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La nécessité de faire preuve de vision

28 septembre 2016

Bâtiment durable Québec CHRONIQUE DE BÂTIMENT DURABLE QUÉBEC
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Architecture is more than the art of constructing individual buildings. It is also the creation of environment. Buildings do not exist in isolation. They not only impose their character on their surroundings but also have an incalculable effect on the lives of human beings who inhabit them.

Flavio Conti (1978)[1]

La capacité d’un bâtiment à offrir des conditions de vie et de travail optimales à ses occupants est déterminante lorsque vient le temps de juger de sa qualité. Après tout, pourquoi ériger des édifices si ce n’est pour loger des occupants et accommoder pleinement leurs besoins ? À l’heure où tout est quantifié, analysé et étudié, l’effet des bâtiments (et même des villes) sur la productivité et la santé de ceux qui les habitent doit certainement être pris en compte.

La nécessité de faire preuve de vision - Photo de Stephane Groleau

Dans son livre Intelligent Buildings : An Introduction[2], Derek Clements-Croome consacre d’ailleurs un chapitre aux répercussions positives et négatives du bâtiment sur le bien-être et la productivité de l’occupant. La revue de la littérature scientifique qu’il propose rappelle, une fois de plus, l’importance d’une meilleure conception en s’appuyant, entre autres, sur une vision élargie, nécessaire dans le contexte socio-économique actuel. Au-delà de la rentabilité immobilière, le facteur humain doit primer !

La qualité et ses avantages

Parmi les nombreux travaux cités par Clements-Croome, notons celui de Miller et coll.[3], une recherche ayant pour objet d’étude plus de 500 bâtiments certifiés LEED ou Energy Star. Les résultats obtenus par les chercheurs montrent que ces bâtiments à valeur ajoutée permettent de réduire le taux d’absentéisme (moins de journées de maladie), d’augmenter la productivité en plus de favoriser l’attraction et la rétention du personnel.

D’un point de vue strictement immobilier, Bernstein et Russo[4] ont pour leur part démontré que cette valeur ajoutée se traduit, aux États-Unis, par une réduction marquée des frais d'exploitation, une augmentation du taux d’occupation et des loyers de 2 % à 3 %. Du côté britannique, Newell[5] mentionne qu’une certification LEED peut impliquer des coûts de construction supérieurs de 6 %. En contrepartie, elle permet de récolter des frais de loyer de 2 % à 6 % plus élevés et de réaliser des économies d’énergie oscillant entre 10 % et 50 %.

La productivité bientôt mesurable aisément ?

D’emblée, le lien unissant les aménagements de qualité et le niveau de productivité des occupants est ardu à définir. Pour ce faire, plusieurs groupes de recherche tentent de soupeser les effets d’une foule de paramètres à l’aide de modèles théoriques complexes. Ainsi, en plus de la qualité des environnements physiques, sont aussi considérés les ambiances sociales, le type d’organisation, le bien-être des individus, la satisfaction au travail, le niveau de stress et plus encore[6]. L’un des objectifs poursuivis par ce type de recherche, tel que l’espèrent Wargocki et coll.[7], est d’éventuellement intégrer la notion de productivité dans le cadre de l’analyse du cycle de vie d’un bâtiment.

Un futur intelligent

Tel que le mentionne Clements-Croome en conclusion de sa revue de la littérature, les environnements bâtis jouent un rôle de premier plan dans nos vies personnelles et professionnelles. Les concepteurs doivent être informés de ce fait et le considérer dans leur travail. En parallèle, ils ont aussi la responsabilité, voire la lourde tâche, de conscientiser les donneurs d’ouvrage au fait que la qualité architecturale est un investissement durable, tant en matière d'immobilier que sur le plan social. En bref, dans notre quête pour des bâtiments intelligents, considérer le facteur humain dès les premières discussions relatives à la vision associée au projet s’avère fondamental.


[1] Conti, F. (1978) Architecture as Environment. London : Cassell.

[2] Clements-Croome, D. (2014) Intelligent Buildings: An Introduction, Routledge: New York, 218 p.

[3] Miller, N.G., Pogue, D., Gough, Q.D. et Davis, S.M. (2009) Green buildings and productivity, Journal of Sustainable Real Estate, vol. 1, no. 1.

[4] Berstein, H. et Russo, M. (2010) Personal communication (with Clements-Croome), McGraw-Hill Construction.

[5] Newell, G. (2009) Developing a socially responsible property investment index for UK property companies, Journal of Property Investment & Finance, vol. 27, no. 5, p. 511-521.

[6] Clements-Croome, D. et Li, B. (2000) Productivity and indoor environment. Proceedings of Healthy Buildings Conference, 6-12 août 2000, University of Technology, Helsinki, vol. 1, p. 629-634.

[7] Wargocki, P., Seppanen, O., Andersson, J., Boerstra, A., Clements-Croome, D., Fitzner, K. et Hanssen, S.O. (2006) Indoor Climate and Productivity in Offices, Federation of European Heating and Air-conditioning Association (REHVA) Guidebook no. 6.


François Cantin

Par François Cantin, M. Sc. Arch.
L’auteur est chargé de projets chez Coarchitecture, spécialiste des stratégies d’occupation et du confort de l’occupant au sein des environnements de travail, formateur pour le Centre de formation en développement durable de l’Université Laval ainsi que bénévole pour la section de Québec du CBDCa.