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Un effort « durable » doit considérer le cycle de vie des projets

23 janvier 2019

Bâtiment durable Québec CHRONIQUE DE BÂTIMENT DURABLE QUÉBEC
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D’un point de vue environnemental, le poids du secteur de l’immobilier est gigantesque. Dans les faits, à l’exception d’un nombre restreint de projets réalisés dans un esprit de développement durable et montrant une empreinte écologique réduite, l’impact des constructions de petite et grande envergure s’avère majoritairement négatif.

Une telle affirmation est rendue possible par la consultation des résultats et des constats issus de nombreuses études s’étant récemment attardées à quantifier les émissions de gaz à effet de serre ainsi que l’utilisation des ressources naturelles associées au monde de l’immobilier. Pour renverser cette situation, les acteurs de ce domaine devront se retrousser les manches.

Quelques chiffres

Comme l’affirme le World Economic Forum dans un rapport intitulé Environmental Sustainability Principles for the Real Estate Industry, les bâtiments consomment, sur une base annuelle, environ 40 % de l’énergie que nous produisons. De plus, ces mêmes édifices sont à l’origine de 20 % des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle planétaire et utilisent 40 % des ressources brutes que nous exploitons.

Plus spécifiquement, une étude menée par la firme dCarbone8 a montré, en considérant une vie utile d’un bâtiment de 60 ans, que 20 % des gaz à effet de serre associés aux bâtiments sont émis lors de la construction et que les 80 % restants résultent de l’occupation et de l’exploitation. À la lumière de ces informations et dans l’optique où il est nécessaire d’améliorer dans les plus brefs délais le bilan environnemental de notre parc immobilier, il apparaît évident qu’un effort « durable » devra viser l’ensemble du cycle de vie des projets de construction.

Urgence d’agir

Les estimations et informations dont nous disposons actuellement indiquent que pour espérer limiter l’augmentation des températures moyennes mondiales à moins de 1,5 °C en comparaison avec celles qui prévalaient à l’ère préindustrielle, soit une variation pour laquelle les conséquences sur le climat et notre qualité de vie seraient observables, mais encore gérables, les émissions de CO2 devront être réduites de l’ordre de 40 % à 45 % d’ici 2030 ! Le temps presse, car si en 2013 le réchauffement moyen observé était d’environ 0,8 °C, nous en sommes aujourd’hui à plus de 1 °C.

Économies potentielles

La bonne nouvelle est que d’importantes économies monétaires et réductions d’émissions de CO2 pourront être obtenues si une plus grande attention est portée à la qualité des constructions neuves et des chantiers de rénovation. Toutes proportions gardées, il est reconnu qu’une rénovation dite durable représente une des meilleures opportunités de réduction des émissions des gaz à effet de serre, et ce, en comparaison avec les actions qui pourraient être posées dans d’autres secteurs d’activité ou industries.

Il importe de souligner qu’entre 35 % et 40 % du potentiel de réduction des émissions liées aux bâtiments dans les pays industrialisés est associé à des coûts négatifs*. Ainsi, certaines technologies ou approches entraînent plus d’économies que leur coût initial. Nous pensons ici notamment, à titre d’exemple, à une réduction de la facture de chauffage d’un bâtiment en raison d’une enveloppe de qualité supérieure. Il est donc possible d’y trouver son compte, à condition de se poser les bonnes questions au bon moment et de revoir ses priorités.

Défi

Ceci étant dit, bien que souhaitable, faire de l’immobilier durable n’est pas chose facile. Pour y parvenir, un changement généralisé de mentalité devra s’opérer. Les développeurs immobiliers devront modifier leurs cultures organisationnelles et leurs stratégies d’affaires de manière à y incorporer les concepts fondamentaux du développement durable. Bien que réalisables, des changements aussi marqués nécessiteront à la fois du temps et du personnel qualifié. Une bonne dose de courage, jumelée au désir réel de vouloir mieux faire, sera aussi requise!

Sans conteste, l’avenir appartient désormais aux équipes de projets qui érigeront en fonction d’une analyse complète du cycle de vie et qui considéreront, au moment de la conception, les nombreux bénéfices à long terme d’un immobilier durable.


* La firme McKinsey & Company a publié des rapports relatifs aux options de réduction des émissions de CO2 pour plus de 20 pays, en plus de proposer des outils d’analyse pour comparer différentes politiques énergétiques. Les rapports peuvent être consultés en ligne sur le site web de l’entreprise : www.mckinsey.com


François Cantin

Par François Cantin, M. Sc. Arch.
L’auteur est chargé de projet chez Coarchitecture, spécialiste des stratégies d’occupation et du confort de l’occupant au sein des environnements de travail, formateur pour le Centre de formation en développement durable de l’Université Laval ainsi que bénévole pour le Conseil du bâtiment durable - Québec (CBDCa-Qc).