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Les surcoûts du net zéro et du Living Building Challenge

12 juin 2014
Par Marie-Ève Sirois

En septembre 2013, trois organisations ont uni leurs efforts pour attaquer le nœud d’une question bien épineuse : les coûts reliés à la construction de bâtiments Living Building Challenge et à énergie nette zéro. Les grandes lignes de leur étude.

Washington DC (District de Columbia) est l’un des états comptant le plus de bâtiments certifiés LEED par personne aux États-Unis[i]. Afin de conserver cette position d’avant-garde, le District de Columbia voulait en savoir plus au sujet du coût des prochaines avancées dans le domaine. Plus particulièrement en ce qui a trait à la certification Living Building Challenge (LBC) et à l’approche nette zéro, tant sur les plans de l’énergie que de l’eau. Pour ce faire, il a commandé en septembre 2013 une étude visant à approfondir les coûts, bénéfices et moyens nécessaires pour passer d’un bâtiment LEED Platine à un niveau de performance supérieur. 

Intitulée Net Zero and Living Building Challenge Financial Study: A Cost Comparaison Report for Building in the District of Columbia, l’étude a été réalisée par trois partenaires : l’International Living Future Institute (ILFI), le New Buildings Institute (NBI) et Skanska USA Building. Les deux premiers ont surtout travaillé sur les stratégies liées à l’usage des ressources (eau, énergie et matériaux) alors que les efforts de Skanska ont davantage porté sur l’estimation des coûts. 

Méthodologie

Pour effectuer cette évaluation théorique, l’équipe de recherche a opté pour la transformation conceptuelle de trois immeubles existants ou sur le point de l’être, conçus pour être certifiés LEED Platine. À partir de ces trois bâtiments de départ, on a calculé le montant à débourser pour les rendre (1) énergie-nette-zéro, (2) eau-nette-zéro et (3) qualifiables pour le LBC. Les bâtiments à l’étude étaient (1) un édifice de bureaux neuf, (2) un immeuble multirésidentiel neuf et (3) un édifice de bureaux rénové.

 Fait à noter, avant de développer des stratégies de compensation pour les consommations d’énergie et d’eau, une stratégie de conservation des ressources a été appliquée au design des trois bâtiments LEED Platine. 

Résultats obtenus

Pour atteindre un niveau de performance de l’ordre de celui du LBC, les investissements additionnels requis par rapport à un bâtiment LEED Platine sont estimés entre 13 et 25 %. Par contre, entre l’approche LEED Platine et celle énergie-nette-zéro, la surcharge se chiffre entre 8 et 16 %. Côté eau, le surcoût pour améliorer la conception d’un bâtiment déjà LEED Platine à un niveau de performance eau-nette-zéro varie entre 2 et 5 %.

Il est à noter les pourcentages de transition sont plus élevés pour le bâtiment rénové, bien que les coûts absolus des mesures soient pour autant inférieurs à ceux des nouvelles constructions. 

Faut-il aussi rappeler que cette étude ne porte que sur trois bâtiments, dans un environnement géographique donné. Cependant, ces résultats offrent un premier regard sur les investissements potentiellement requis pour ces approches encore très marginales, qui présentent toutefois plusieurs avantages financiers au niveau des coûts d’exploitation. Ceux-ci ne faisaient cependant pas partie du cadre de cette recherche. 

Stratégies et coûts

Parmi les stratégies énergétiques adoptées pour réduire les consommations énergétiques des trois bâtiments, notons la diminution des superficies fenestrées au profit de murs isolés, l’augmentation du niveau d’isolation de l’enveloppe, l’ajout de détecteurs de présence et l’installation de chauffe-eau solaires et de panneaux solaires photovoltaïques.

Édifice de bureaux,  bâtiment existant rénové. Crédit de  ILFI, NBI et Skanska

Côté eau, les mesures sont sensiblement les mêmes pour les trois bâtiments. On tente de recueillir un maximum d’eau de pluie sur le site à l’intérieur de réservoir souterrain. Les eaux grises et noires sont traitées in situ par un système à bioréacteur. L’impact de ces mesures est relativement faible sur le coût total du bâtiment par rapport aux deux autres transformations. Et pourtant, à l’échelle d’une communauté, les bénéfices économiques et environnementaux peuvent être substantiels. 

Édifice de bureaux - nouvelle construction. Crédit de  ILFI, NBI et Skanska

En ce qui a trait à l’augmentation de la performance des bâtiments à un niveau tel qu’ils répondent aux exigences du LBC, le dernier cran qui nécessite des investissements après l’énergie et l’eau concerne les matériaux. Cet aspect de la certification nécessite beaucoup de recherche et de coordination afin d’assurer qu’aucune substance de la liste rouge des matériaux ne se retrouve dans le bâtiment. Le coût de cette main-d’œuvre a été considéré. La balance des exigences ne nécessite qu’une conception rigoureuse et non nécessairement des équipements additionnels ou plus dispendieux.

Bâtiment multirésidentiel - nouvelle construction. Crédit de  ILFI, NBI et Skanska

Ainsi, selon les auteurs l’une des plus importantes clés du succès d’un projet Living Building Challenge est de mettre l’accent sur la conception intégrée, ceci afin que les plus hautes performances soient atteintes au prix le plus faible possible. 

Particularités

Bien que la plupart des mesures conceptuelles n’aient pas eu d’incidence notable sur le design du bâtiment, l’une d’entre elles a significativement changé la signature architecturale du concept. Il s’agit du remplacement d’un mur-rideau de verre par un mur isolé avec des percements pour les fenêtres, ce qui par conséquent diminue le ratio de fenestration. 

Aussi, le document stipule que tenter l’approche nette zéro à l’échelle du bâtiment n’est pas toujours une solution viable. Notamment pour les bâtiments de grande envergure, qui n’ont pas nécessairement la capacité de générer toute l’énergie qu’ils consomment. Par contre, à l’échelle d’un quartier, l’approche semble plus raisonnable et réaliste. Le même principe s’applique en ce qui concerne l’eau. 

D’autre part, les critères de performances visés par l’étude impliquent nécessairement qu’une attention particulière soit portée sur les opérations et l’entretien, de même que les charges aux prises murales. L’étude tient pour acquis que ces facteurs sont sous contrôle dans un bâtiment LEED Platine et qu’ils ne nécessitent pas de dépenses additionnelles.


[i] Source : 2012 Green Building report.

Recommandations du rapport pour les instances publiques
  • Définir et encadrer le concept d’énergie-nette-zéro. 
  • Encourager la transition vers un code de l’énergie basé sur des cibles de performance. 
  • Encourager l’approche nette zéro à l’échelle des quartiers plutôt qu’à celle des bâtiments.
  • Créer des programmes de subvention favorisant les initiatives avant-gardistes dans le domaine de l’économie d’énergie.
  • Réviser les politiques de services des fournisseurs d’énergie pour favoriser l’essor d’énergies renouvelables produites in situ.
  • Exiger un niveau minimum de points dans la catégorie Énergie de LEED pour que l’efficacité énergétique des bâtiments verts soit incontournable.
Consultation de l’étude en ligne