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Recherches avancées sur la construction écoresponsable en bois

4 avril 2019
Par Michel Bouchard

Regard sur les avancées de la Chaire industrielle de recherche sur la construction écoresponsable en bois, à l’Université Laval, dans la réduction de l’empreinte environnementale des bâtiments.

Favoriser l’utilisation du matériau bois dans la construction de bâtiments commerciaux et résidentiels multiétagés, avec comme pour point de mire la réduction de leur empreinte écologique, tel est le dessein de la Chaire industrielle de recherche sur la construction écoresponsable en bois (CIRCERB). Après un premier mandat de cinq ans couronné de succès, un nouveau plan quinquennal s’amorce avec une volonté de pousser l’innovation encore plus avant pour toile de fond.

Installé dans le pavillon Gene-H.-Kruger de l’Université Laval – une construction en bois – le CIRCERB est une plateforme académique qui, axée sur la multidisciplinarité, se veut un amalgame d’une logique implacable entre recherche, connaissance et application concrète. Sa création découle d’une volonté commune de développer des applications permettant d’élargir l’utilisation du matériau bois dans le bâtiment dans une perspective de développement durable.

« Le CIRCERB est une initiative qui a émergé d’un chantier de travail à l’origine du rapport Beaulieu sur la construction écoresponsable en bois au Québec, rappelle Pierre Blanchet, titulaire de la Chaire. Parmi les mesures suggérées, on y retrouvait la mise en place d’initiatives gouvernementales appuyant la construction en bois. Nous avons saisi la balle au bond et mis sur pied un consortium de recherche avec les partenaires du milieu, ce qui a mené à une première programmation de recherche. »

Partenaires actifs

Une quinzaine de partenaires issus de l’industrie ont uni leurs forces pour faire du CIRCERB ce qu’il est aujourd’hui. On retrouve des organisations œuvrant dans diverses sphères d’activité, soit : Kruger ; Corruven ; Maibec ; Provencher_Roy ; Société Laurentide ; Vertima ; Chantiers Chibougamau – Nordic Structures ; Cima+ ; Sotramont ; Coarchitecture ; UL CLEB ; Art Massif ; FPInnovations ; Cecobois ; et Association provinciale des constructeurs d’habitations du Québec. Sans compter l’apport de la Société québécoise des infrastructures, de Transition énergétique Québec ; de la Société d’habitation du Québec ainsi que du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs.

Pierre Blanchet, Normand Hudon et Steve Desrosiers

« Ce sont des partenaires actifs qui s’engagent à fournir une contribution à la fois en argent et en temps ou en matériaux, précise Pierre Blanchet. De pouvoir notamment prendre le pouls en amont de professionnels de l’architecture et de l’ingénierie, de la construction ainsi que de fournisseurs, ça ne peut que nous permettre d’avoir une meilleure portée dans nos résultats. Car développer des solutions et essayer ensuite de les pousser dans le système, ce n’est pas nécessairement la meilleure approche. »

Axes de recherche

La programmation du CIRCERB couvre toute la chaine de valeur de la construction en bois. Pour y arriver, elle a développé trois axes de recherche s’articulant autour de sept grands thèmes : la conception (conception intégrée, analyse du cycle de vie et écoconception) ; la construction (matériaux, systèmes constructifs et logistique) ; et l’exploitation du bâtiment (durabilité et efficacité).

Les objectifs visés par la Chaire se déclinent sur deux plans. Le premier est de former des ressources hautement qualifiées dans la filière de la construction en bois et des produits forestiers, alors que le second consiste à générer la connaissance. « Il faut engendrer une masse critique de travaux qui vont permettre à l’industrie de cheminer. Des projets qui touchent l’ensemble de la filière, souligne Pierre Blanchet.

Si le niveau stratégique de la recherche implique un engagement des partenaires à aider l’ensemble du secteur, le niveau spécifique de la recherche est davantage lié à des problématiques rattachées à l’élaboration d’une construction ou au développement d’un matériau, donc il répond plus à des besoins précis d’un partenaire.

Le président d’Art Massif, Steve Desrosiers, est bien placé pour en parler. Le fabricant de structures Art Massif a rejoint le partenariat du CIRCERB au début de l’an 2 de son premier mandat, après qu’il se soit informé des possibilités de mener des recherches sur un type bien précis de connexion pour le bois lamellé-collé. Une initiative qu’il n’a pas eu à regretter. « Nous avons eu une réponse extrêmement positive, indique celui qui préside aussi actuellement le bureau de direction de la Chaire. La présence de compétiteurs au sein du partenariat ne pose pas problème. On est assis à la même table et l’Université arrive à comprendre et gérer les besoins de chacun. »

Besoins particuliers

« Le CIRCERB nous donne accès à un savoir et à des installations auxquelles dont nous pourrions bénéficier autrement, poursuit-il. La contrepartie veut qu’en travaillant avec des étudiants, les choses n’avancent pas nécessairement à la vitesse de l’industrie, mais l’exercice demeure très adaptatif et leur apport nous force à penser en dehors de la boîte, sans contraintes. »

Ce n’est pas l’architecte Normand Hudon, associé de Coarchitecture, qui va le contredire. « Avec la contribution du CIRCERB, nous avons notamment pu développer un système de mur préfabriqué en ossature légère de bois d’ingénierie », dit-il, lui qui a été le premier président du bureau direction de la Chaire.

Il souligne que la collaboration avec le CIRCERB a permis l’utilisation d’équipements de haute technologie et l’assistance de professionnels pour tester les connecteurs ou encore la résistance au feu, ce qui a permis d’acquérir de la connaissance et une optimisation des procédés. « Ça nous inspire beaucoup, indique-t-il. Et ce qui nous intéresse aussi, c’est aussi la formation de main d’œuvre spécialisée de haut niveau. »

Retombées positives

De nombreuses retombées positives ont émergé du mandat du CIRCERB grâce à l’engagement de cinq facultés de l’Université Laval et la contribution de quatre autres universités au Québec. Ce sont 69 projets de maîtrise, doctorat ou post-doctorat qui ont été menés, en plus de 39 stages d’étudiant de premier cycle en entreprises. 

Les chercheurs engagés dans le CIRCERB ont pu se pencher sur des thématiques qui touchent l’ensemble du secteur et étudier des solutions aux barrières freinant l’utilisation du bois dans les bâtiments commerciaux et résidentiels multiétagés. À titre d’exemple, l’assurabilité des chantiers de construction. « C’est intéressant d’utiliser le matériau de bois dans le parc immobilier, mais si l’assurabilité du chantier n’est pas accessible, l’argent parle, explique Pierre Blanchet. Il fallait comprendre comment était interprétée la chose dans le monde de l’assurance et revoir le secteur en langage d’actuariat. »

Plusieurs projets de recherche ont débouché sur des solutions concrètes. « Nous avons eu des projets de systèmes de caissons biosourcés, des projets d’innovation sur des structures novatrices, comme les résilles, et sur les exigences acoustiques en construction en bois. Nous avons aussi beaucoup travaillé sur la documentation des connexions bois-béton.

« Un des étudiants en droit a analysé en profondeur le régime d’appels d’offres du gouvernement du Québec pour ainsi identifier les freins à l’utilisation de matériaux innovants, poursuit-il, de sorte que l’on a pu dénombrer plusieurs interprétations faussées dans la règlementation. La volonté du législateur n’est pas automatiquement associée à l’application qu’on en fait. Ce type de recherche touche l’ensemble des intervenants et est structurant pour tout le secteur. »

La commercialisation représente une dimension complexe. Lorsqu’on travaille avec un partenaire unique, on peut penser à des débouchés de commercialisation, mais quand on travaille avec 10 ou 15 partenaires, c’est l’aspect stratégique qui est exploité, car on vise davantage la connaissance que la commercialisation.

Partage des connaissances

« On retourne les connaissances à la société, indique Pierre Blanchet. On fait connaître des techniques, des matériaux et des procédés aux éventuels utilisateurs. On ne fait pas la promotion directe de la construction en bois, on en fait la promotion à travers le développement de connaissances. »

Le second mandat du CIRCERB s’inscrira d’ailleurs dans la continuité. « Nous avons modulé en fonction des nouveaux venus. Parmi les objectifs visés, nous allons nous pencher sur les certifications et la portion enveloppe du bâtiment, notamment avec la présence de UL CLEB.