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Un avenir pour les mini-maisons ?

27 avril 2012
Par Léa Méthé Myrand *

Un développement de mini-maisons tel Division 43, sur la côte Ouest américaine, offre une nouvelle façon de densifier la ville. Un concept applicable au Québec ?

Les projets offrant des micro-condos de 200 à 500 pieds carrés connaissent un franc succès dans les grandes villes nord-américaines. Et dans cette foulée, les développements de mini-maisons pourraient eux aussi concourir à une densification urbaine. Reste à voir, cependant, si cette formule pourrait avoir de l’avenir en sol québécois.

« On construisait au début du siècle des habitations avec des superficies de 600 pieds carrés sans prévoir de stationnement. Non seulement ces dernières existent encore aujourd’hui, mais elles sont très convoitées », observe d’entrée de jeu David Paradis, urbaniste chez Vivre en Ville, un organisme voué à la promotion des collectivités viables.

Le plus grand constructeur de maisons aux États-Unis, DH Horton, a fait le pari de la mini-maison neuve dans le quadrilatère sud-est de Portland, en Orégon. Son nouveau projet, Division 43, propose 29 unités de 364 pieds carrés à 687 pieds carré. Elles sont érigées sur trois anciens lots fusionnés, au coin de la rue SE Division et de la 43e avenue.

Trois maisons unifamiliales, trois duplex et trois quatre-plex forment le petit développement aux couleurs d’un centre de villégiature. Fait à noter, on y compte une remise pouvant loger 32 vélos, mais aucun stationnement.

« À Montréal, on est de plus en plus portés sur l’aspect écologique, dit Louis C. Migneault, vice-président Opérations de DevMcGill, un promoteur de condos de la métropole qui offre notamment des micro-condos avec son projet M9, dans la Cité du Multimédia. Mais on est encore loin de certaines villes américaines, dont Portland. En installant trois unités là où il n’y en aurait généralement qu’une, on densifie et réduit ainsi le coût relatif du terrain.»

Il estime qu’un tel concept demeurera marginal ou une exception dans le marché. « Ces petites maisons super abordables vendraient bien à Montréal, explique-t-il, mais encore faudrait-il avoir le droit de les bâtir ! Dans la plupart des municipalités, il est interdit de subdiviser un lot de maison individuelle pour y construire une maison-jardin pour un ainé. Imaginez si on proposait de construire un petit quadriplex dans un quartier de maisons détachées…

Pour que la formule soit répétée, le vice-président de DevMGill avance que les conditions exceptionnelles qui ont contribuées à faire éclore cette idée se reproduisent : un quartier d’unifamiliales où la ville permet d’installer un petit triplex ou quadruplex et un lot relativement abordable qui, normalement, ne devrait comporter qu’une résidence.

Pour lui, cela ne fait que prouver que ce quartier de Portland est plus enclin à la densification, peut-être à cause de la place prépondérante qu’occupe l’environnement dans cette ville. Car la densification réduit l’étalement urbain et l’empreinte de l’humain sur la planète.

« Au Québec, dit-il, on aime aussi densifier mais par secteur afin de ne pas trop mélanger les triplex, quadriplex et maisons unifamiliales. En fait, c’est plus harmonieux ainsi. Dans les quartiers où le zonage permet de densifier, le terrain est beaucoup plus cher et pour rentabiliser le lot, les promoteurs devront aller au maximum de la hauteur permise et construire des blocs de copropriétés de trois ou quatre étages. »

Le meilleur des mondes

Le bloc-appartement ne répond toutefois pas aux besoins et aux aspirations de tout le monde. « Ce n’est pas le multiplex qui intéresse les gens, affirme pour sa part David Paradis, de Vivre en Ville. C’est les deux étages avec une entrée à soi. La petite maison, c’est le meilleur des mondes. Je suis convaincu qu’on créerait la demande. »

Ce dernier voit l’opportunité de bâtir ainsi sur de grands lots dans les premières couronnes de banlieue, sur les bouts d’îlots et les centres commerciaux boudés le long des boulevards. Du point de vue de la collectivité, l’atteinte d’un certain niveau de compacité permet d’offrir des services publics plus intéressants. La densité souhaitée peut toutefois prendre plusieurs formes : « Tant qu’on va rompre les densités de maisons unifamiliales avec du quatre ou cinq étages, les gens vont s’objecter », dit-il.

David Paradis perçoit donc un plus grand potentiel pour le format inusité de Division 43, ajoutant qu’il faut miser sur la qualité de l’architecture et des espaces partagés : « On est capable de faire du néotraditionnel pour la villégiature, pourquoi ne le ferait-on pas pour notre quotidien ? Des maisons différentes donnent de la valeur à l’ensemble et la différence, ça se paye. »

Si le phénomène des très petites maisons se manifeste au Québec, le marché local ne manquera cepenant pas d’apporter quelques ajustements à la formule de DH Horton. La présence de trois salles de bain dans moins de 687 pieds carrés, par exemple, serait sans doute remise en question.

« Les Américains ont de la difficulté à se passer de la salle de bain privée attenante à la chambre à coucher, souligne Louis C. Migneault, qui a œuvré comme promoteur immobilier pendant sept ans au Texas.La maison neuve moyenne aux États-Unis est beaucoup plus grande qu’au Québec et même quand ils rapetissent, ils s’accrochent à ce vestige de luxe. Les Québécois sont plus rationnels dans leur utilisation de l’espace… »

S’il en est véritablement ainsi, la menue maison fera peut-être son apparition sous peu dans les quartiers urbains.

* L’auteure est chargé de projets chez Écobâtiment

Petit et écolo

Petit est un euphémisme quand il s’agit de décrire les espaces de vie du projet Division 43. Et pourtant, on ne se sent pas trop à l’étroit dans les unités modèles. L’installation des blocs cuisine sous l’escalier, par exemple, permet d’utiliser au mieux cet espace tronqué. Les petits électroménagers, les portes coulissantes et le lit escamotable en option contribuent aussi à l’optimisation de l’aménagement.

Outre la petite taille des logements et l’emphase mise sur les transports actifs, l’ensemble se distingue par l’intégration de plusieurs éléments écologiques : système solaire photovoltaïque pour l’éclairage des aires communes, pavés poreux, jardins de pluie et citernes d’eau de pluie pour l’arrosage.