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Le siège social de Clef des champs

4 octobre 2013
Par Marie-Ève Sirois*

Le siège social de Clef des champs : un bâtiment tout de bois qui tire profit de la chaleur du sol de plusieurs façons.

Pour la construction de son siège social dans les Laurentides, Clef des champs a misé sur une approche en accord avec sa philosophie d’entreprise. L’herboristerie, qui donne aussi dans l’agriculture biologique, la transformation et la distribution de thés, herbes et épices, a notamment choisi la conception intégrée, l’architecture bioclimatique et la sobriété énergétique. 

Fin 2007. L’entreprise apprend que les locaux qui lui sont loués ne seront plus disponibles dès août 2009. Afin de rassembler toutes ses opérations en un seul lieu, Clef des champs choisit de construire son propre siège social à même son terrain boisé de Val-David, où sont déjà établis ses jardins depuis 2004. 

Été 2008. Le travail de conception intégrée débute en collaboration avec les architectes de blueandyellow. L’architecte Julia Bourke décrit les premières étapes du processus : « Le client a d’abord défini une vision, puis des objectifs environnementaux, sociaux et économiques. Pour les stratégies, nous avons privilégié les synergies et les mesures passives. » 

Été 2009. La construction du nouveau siège social de 1 000 mètres carrés démarre sur le terrain à flanc de montagne. François Dufort, acheteur pour la petite entreprise régionale commente le déboisement : « Nous avions un entrepreneur dévoué. Deux grands pins ont été transformés en planches de finition ; épinettes et pruches sont devenues du bois de clôture et de mobilier de jardin. Les souches ont servi à niveler l’agrandissement de la zone à compost et le reste a été transformé en bois raméal pour les jardins. Aucun feu à ciel ouvert n’a été allumé et tous les résidus forestiers ont été détournés du site d’enfouissement. » 

Les caractéristiques du site ont guidé certains choix architecturaux. « Nous étions limités par le chemin existant et un milieu humide, précise Julia Bourke. Nous avons donc opté pour un bâtiment long et étroit. La façade nord est complètement enfouie dans le sol, ce qui permet de réduire les pertes thermiques, mais aussi l’impact visuel de l’infrastructure de deux étages. » 

Le bois est omniprésent, tant à l’intérieur qu’en façade. Derrière le déclin de cèdre se trouve l’ossature de bois lamellé-collé de Chantier Chibougamau. Le tout est surmonté d’une toiture entièrement végétalisée, où poussent des plantes médicinales. « Des débords de toits ont été conçus de manière à prévenir la surchauffe en été et à favoriser le gain thermique en hiver. Ceux-ci sont juste assez longs pour ombrager le deuxième étage, car le premier est protégé par la forêt », indique l’architecte, qui préconise la réduction des matériaux à la source. 

L’énergie du sol a la cote dans ce projet ayant obtenu la certification LEED-NC, niveau Or, en janvier 2013. Non seulement le chauffage et la climatisation proviennent d’une boucle géothermique, mais l’entrée d’air frais est constituée d’un conduit de 60 mètres de long, enfoui trois mètres sous terre. Ce puits canadien permet de tempérer l’air de manière passive avant le conditionnement mécanique. 

Malgré des problèmes d’étanchéisation initiaux, tous les intervenants s’entendent pour dire que le puits canadien est un grand succès. À savoir pourquoi cette méthode n’est pas plus souvent utilisée, la réponse de l’ingénieur Martin Roy éclaire : « c’est une solution qui tombe entre deux chaises, à cheval entre le génie mécanique et civil, mais qui relève aussi de l’architecture ». 

Fait plutôt rare, le projet a obtenu le point Bâtiment durable, un crédit unique au système canadien. « Pour viser ce dernier, explique Julia Bourke, il faut entre autres avoir un professionnel de l’enveloppe dans l’équipe, minimiser l’usage des matériaux et considérer leur cycle de vie. » 

Rien n’a été laissé pour compte. À l’intérieur, dans l’atrium, un mur végétal expérimental agrémente l’espace communautaire qui relie la zone de production aux bureaux. Les végétaux son irrigués par le biais d’un bassin de collection des eaux grises. 

Quelques aléas ont eu raison du budget initial. « L’hiver, raconte François Dufort, tout est plus laborieux avec le froid, la neige et la glace ; la progression escomptée n’était pas au rendez-vous, mais il fallait emménager le plus rapidement possible. Ainsi, nous avons parfois dû acheter des matériaux peu communs rapidement, à prix plus élevé. » Au final, une quarantaine d’employés ont fièrement emménagé dans ce bâtiment qu’on dit très lumineux en mai 2010, fruit d’un investissement total de trois millions de dollars.


* Marie-Ève Sirois est cofondatrice d’Écobâtiment.

Cibles et performances
  • Réduction de la consommation énergétique de 69 % par rapport à la référence du CMNÉB, ce qui équivaut à une réduction de 30 tonnes de gaz à effet de serre par an
  • Réduction de la consommation d’eau potable d’au moins 30 %
  • Au moins 75 % des déchets de construction ont été détournés du site d’enfouissement

 

Mesures durables
  • Stationnement couvert pour 10 vélos ou 15 paires de skis de fond
  • Déboisement responsable
  • Gestion des eaux pluviales (100 %)
  • Réduction de la pollution lumineuse
  • Aménagement paysager sans irrigation
  • 7,5 % de matériaux avec contenu recyclé
  • 20 % de matériaux régionaux
  • Bois certifié FSC
  • Mise en service améliorée
  • Lumière naturelle et vue pour 90 % des espaces
  • Masse thermique importante
  • Zone de compostage aérobique d’environ 23 000 m2
  • Produits de nettoyage écologiques et sacs biodégradables
  • Réemploi des retailles de bois lamellé-collé pour fabriquer l’escalier de l’atrium et du mobilier

 

Stratégies éconergétiques

Conditionnement de l’air :

  • Deux thermopompes de 14 kW sur une boucle géothermique
  • Planchers et murs radiants à l’eau chaude
  • 85 % du chauffage est assuré par la géothermie, selon un COP de 4,0
  • Appoint et redondance : chaudière électrique de 60 kW
  • Zone de production refroidie mécaniquement via la géothermie, avec un COP de 6,8
  • Trois panneaux solaires thermiques préchauffent l’eau chaude domestique
  • Chauffe-eau électrique de 6 kW pour la charge restante (50 %)

Ventilation :

  • Système de ventilation de type 100 % air neuf qui alimente des ventilo-convecteurs dans la zone de production
  • Le taux de récupération de chaleur est évalué à environ 75 % :
    • 66 % via la roue thermique
    • 5 à 10 % via le puits canadien qui préchauffe ou rafraîchit l’air, selon la saison
  • Ventilation naturelle avec effet de cheminée créé par l’atrium
  • Fenêtres ouvrantes dans tous les locaux de l’étage supérieur

Enveloppe :

  • Murs extérieurs : RSI 5,0
  • Toiture : RSI 7,3
  • Côté nord du bâtiment enfoui dans la montagne, ce qui permet de minimiser les pertes thermiques et profiter d’un refroidissement gratuit pour l’entrepôt
  • Axe long du bâtiment orienté est-ouest avec façade sud bien exposée au soleil
  • Toiture entièrement végétalisée
  • Fenestration : double vitrage low-e, argon
  • Taux de fenestration : 16 % 

Éclairage :

  • Fluorescents de type T5 avec ballasts électroniques, fluocompactes et diodes électroluminescentes à l’intérieur
  • Éclairage au xénon à haute intensité de décharge (HID) à l’extérieur
  • Densité de puissance moyenne de 7,32 W/m2 alors que la référence actuelle est de 16,71 W/m2

 

Équipe du projet

Client : Clef des champs

Architecture et certification LEED : blueandyellow

Génie électromécanique : Martin Roy et associés

Génie structural : Shector Barbacki Shemie et Associés

Mise en service améliorée : Concept-R

Construction : Les Constructions Tétris

Structure en bois : Nordic bois d’ingénierie

Aménagement paysager : Clef des champs et Mathieu Royal