Aller au contenu principal
x
21 octobre 2015
Par Rénald Fortier

Un projet qui propulse la construction en bois massif vers un nouveau  sommet : les écocondos Origine à Québec.

Un bâtiment hors du commun prendra forme au cours des prochains mois dans l’écoquartier de la Pointe-aux-Lièvres à Québec : celui des écocondos Origine. C’est que cet immeuble de 13 étages, qui s’élèvera sur 40,9 mètres, sera pourvu de la plus haute structure en bois massif en Amérique du Nord, du moins pour un temps. Même qu’il sera sans égal ailleurs dans le monde dans le cas d’une construction tout en bois, elle qui sera constituée de poutres et de colonnes en lamellé-collé ainsi que de murs et de dalles de plancher en lamellé-croisé (CLT).

Ce projet de l’ordre de 25 millions de dollars réunissant 94 unités d’habitation en copropriété est piloté par le consortium NEB sous le parapluie duquel sont réunis trois partenaires : le constructeur EBC, le fournisseur de structures de bois massif Nordic et le promoteur Synchro Immobilier.

Un tel projet prévoyant l’érection de 12 étages en bois – ils reposeront sur un socle de béton – n’est évidemment pas sans s’accompagner de sa part de défis. À commencer par la nécessité de faire les démonstrations s’imposant notamment sur les plans de la résistance au feu et de la vitesse de propagation des flammes d’un étage à un autre. Et d’intégrer au concept les mesures différentes acceptées par la Régie du bâtiment du Québec (RBQ), comme encapsuler le bois à l’intérieur avec des panneaux de gypse pour ne citer que cet exemple.

Soulignons que ce projet a même fait l’objet d’un d’essai de résistance au feu normalisé et d’un feu de démonstration sans précédent au laboratoire du Centre national de recherche scientifique Canada à Ottawa, ceci sous la supervision scientifique de FPInnovations. André Huot, directeur du développement des affaires de Nordic Structures Bois – Québec, relate : « On a fait brûler à une chambre de combustion dans laquelle était chargée environ trois fois la charge normale d’un appartement, à proximité d’une cage d’escalier de trois étages.

« Au terme de ce feu qui a duré 2 h 40 à une température de plus de 1 000 degrés F, poursuit-il, la structure était intacte et la chaleur ne s’était pas transmise à la cage d’escalier, ce qui a aussi permis de démontrer l’étanchéité de la structure à la propagation de la fumée. »

Pour l’architecte Yvan Blouin, de Synchro Immobilier, la nécessité de réaliser un tel projet innovateur de la façon la plus économique s’imposait dès le départ, histoire de s’assurer que le prix des unités d’habitation puisse demeurer compétitif sur le marché. Et que c’est même la légèreté du bois qui a permis de relever ce défi en rendant possible la construction d’un immeuble de grande hauteur pour rentabiliser le projet.

Il explique : « Nous devons composer avec un terrain près de la rivière Saint-Charles qui n’a à peu près pas de capacité portante, dont le sol se liquéfie. En béton, on ne pourrait faire que six étages, mais avec le bois ça permet de monter jusqu’à 13 puisqu’il est environ 55 % plus léger. Et même là, il a fallu mener des études approfondies sur les différentes méthodes permettant de réaliser les fondations.

« La solution qui a finalement été préconisée par WSP, note-t-il, c’est de mettre en place sur toute la surface du terrain un radier en béton de 900 mm d’épaisseur et sur lequel sera déposé le bâtiment. Et sur cette plateforme là, tout le poids du déblai qu’on va enlever va être équivalent au poids de l’immeuble, plus celui de la fondation. Donc, on ne crée ainsi aucune pression additionnelle sur le sol. »

Construction accélérée

Le recours au lamellé-collé et au CLT permettra d’ériger le bâtiment rondement, alors que les étages s’élèveront au rythme d’un par semaine. En tout, ce sont 13 semaines qui seront requises pour compléter la structure de bois.

« On montera trois étages à fois, incluant les poutres et les colonnes, précise André Huot. Ces dernières seront entrées les unes sur les autres pour placer le bois sur sa portion la plus dense. Il n’y aura pratiquement pas d’affaissement, car lorsque l’on sera rendu au 13 e étage, le bois va avoir pris l’affaissement qu’il avait à prendre et va devenir stable.

« Comme les panneaux de CLT vont constituer les murs extérieurs, ajoute-t-il, les trous des fenêtres vont déjà être au millimètre près. C’est un bâtiment qui est préfabriqué dans son ensemble parce qu’on livre les éléments structuraux au complet. Un fois les composantes en bois montées au chantier, il ne restera plus qu’à poser le gypse et l’isolation supplémentaire. »

Cette rapidité d’exécution va d’ailleurs exiger une planification réglée au quart de tour de la part d’EBC. C’est que lorsque l’élévation de la structure sera rendue au quatrième étage, il pourra dès lors être possible de commencer l’installation dans les niveaux inférieurs. Et que dans les huit dernières semaines que durera le montage du bâtiment, plusieurs corps de métiers s’y chevaucheront.

« Il est certain qu’il va falloir que l’organisation du chantier soit bien contrôlée, indique Stéphane Gagné, directeur, Construction, chez EBC. Le contrôle de la qualité que va exiger l’installation des coupe-feux et l’acoustique va aussi être un défi en soi. Nous allons avoir de l’éducation à faire avec les sous-traitants et leurs travailleurs pour lesquels il sera nouveau de travailler avec le bois lamellé-collé et le CLT dans un projet de cette envergure. Et c’est ce qui rend ce projet intéressant, car nous sommes en voie d’innover en mettant en place une véritable vitrine sur la construction en bois massif. » 

Équipe du projet

Promoteur : Synchro Immobilier

Architecture : Yvan Blouin Architecte

Fourniture de la structure : Nordic Structures Bois

Construction : EBC

Génie électromécanique : Génécor Experts-Conseils

Génie structural : WSP

Génie civil Groupe conseil SID

Consultation LEED : Vertima

 

Mesures durables
  • Structure en bois massif (séquestration de 2 377 tonnes d’équivalent CO2)
  • Chauffage à eau chaude au gaz naturel
  • Plancher radiant
  • Toiture végétalisée (environ 8 000 pi ca) aménagée au-dessus du basilaire
  • Enveloppe performante (murs, R24,5 ; toiture : R43,1) exempte de ponts thermiques
  • Récupération de 90 % des résidus de construction
  • Finis architecturaux à faible émissivité
  • Appareils de plomberie à faible débit
  • Chute à déchets intelligente sur chaque étage
  • Borne de recharge pour véhicules électriques
  • Espace de stationnement pour véhicules à frais partagés
  • Et autres

 

La structure détaillée
  • Hauteur : 40,9 mètres ; 12 étages en bois massif s’élevant au-dessus d’un socle de béton
  • Coût de la structure de bois : 3,3 M$ incluant l’installation
  • Poids de la structure de bois : environ 1 550 000 kg au total
  • Volume de CLT : environ  2 750 mètres cubes
  • Nombre de panneaux de CLT pour un étage typique : murs : 70 à 90 ; dalles : 30 à 40
  • Dimensions des panneaux de CLT : largeur de 2 438 mm par la longueur requise
  • Poids des panneaux de CLT : 300 kg pour les panneaux de mur extérieur non structural ; jusqu’à 2 800 kg pour les panneaux de mur de refend ; jusqu’à 3 800 kg pour les panneaux de plancher
  • Dimensions des poutres en lamellé-collé : profondeur de 597 mm et largeurs variant entre 137 et 279 mm
  • Dimensions des colonnes en lamellé-croisé : 456 mm sur 457 mm pour les colonnes au niveau 1 et 368 mm sur 318 mm au toit

Source : Nordic Structures Bois