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COVID-19 : vers un recours accru aux matériaux régionaux ?

31 mars 2020

Par Marc-Antoine Côté

La crise du coronavirus pourrait-elle mener à une utilisation accrue de produits et systèmes régionaux dans le design des bâtiments au Québec? Réflexions sur fond de relance économique et de durabilité.

Les contrecoups de cette pandémie mondiale sont nombreux et le milieu du bâtiment au Québec n’y échappe pas, loin de là même. Mais le resserrement des frontières et les enjeux d’approvisionnement qui en découlent pourraient éventuellement favoriser certains changements positifs en sol québécois. À première vue, du moins.

« C’est intéressant de se poser la question. Il y a la crise, qui nous force à nous demander quoi faire, mais aussi comment on peut bâtir et rebondir par la suite. Voir quel est l’impact et comment l’industrie peut en profiter. Il va y avoir des mises à pied, mais aussi des opportunités et des réflexions à avoir pour savoir comment on repart ces industries-là », observe Guillaume Martel, architecte, expert en bâtiment durable, chez Provencher_Roy.

C’est qu’à défaut d’être garante de changements, la situation pourrait servir de catalyseur tant en ce qui a trait à l’approvisionnement qu’à l’économie circulaire. Des enjeux qui ont amplement été discutés au cours des dernières années et qui pourraient être ramenés à l’avant-plan.

Pour Nadia Bini, directrice, Développement durable chez Menkès Shooner Dagenais LeTourneux Architectes, la question de la provenance des matériaux n’est cependant pas la seule à se poser. Dans un contexte où l’on cherche de plus en plus à atteindre la carboneutralité des bâtiments, il faut également voir si le coût est le bon et si le produit permet une performance optimale.

« Après, il y a aussi un rapport qualité-prix. Même aujourd’hui, on fait un choix de favoriser un produit un peu plus cher versus un autre parce qu’il répond à une certaine qualité. Mais si un produit québécois ou canadien répond à la qualité à laquelle on s’attend, qu’il y a une diversité de produits, je pense qu’il y a toujours un intérêt à favoriser des produits régionaux », explique-t-elle.

Les usines qui réorientent temporairement leurs activités pour aider le milieu médical, des gens de tous les secteurs qui innovent pour prêter main-forte… Les exemples d’adaptation sont nombreux depuis quelques semaines. C’est le signe d’une culture entrepreneuriale très forte et d’un potentiel de faire les choses autrement, dans la construction comme ailleurs, selon Mme Bini.

Guillaume Martel, architecte, expert en bâtiment durable chez Provencher_Roy et Nadia Bini, directrice, Développement durable chez Menkès Shooner Dagenais LeTourneux Architectes

Et l’économie circulaire ?

Si son homologue Guillaume Martel apporte lui aussi quelques nuances concernant une éventuelle intégration accrue des produits québécois dans le bâtiment, il croit que la situation peut s’avérer propice à une certaine évolution. Que ce soit pour le gypse, le béton ou le bois, plusieurs industries manufacturières sont déjà bien implantées au Québec. Mais certains produits ne sont pas toujours au rendez-vous. « C’est de voir après si d’autres matériaux, qui n’étaient pas nécessairement produits au Québec en grande quantité, peuvent trouver un débouché », avance l’architecte.

Et il s’agit également de voir si l’économie circulaire ne pourrait pas être revue au passage, elle aussi. Avec la crise des derniers mois, le moment pourrait être bien choisi autant au Québec que sur le reste du continent.

« Ça va être intéressant de voir si on peut se servir de cette crise-là pour justement développer l’économie circulaire. Est-ce qu’on peut développer des filières de recyclage, de redéveloppement de matériaux, que ce soit l’aluminium, l’acier? Est-ce qu’il va y avoir d’autres filières qui seront développées? Ça pourrait être intéressant de voir si la crise va mener à ça, ou se relever avec ça. »