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Le manège militaire du 35e Régiment à Québec

18 décembre 2018
Par Marie Gagnon

Un bâtiment durable qui se distingue par son intégration et son efficacité énergétique : le manège militaire du 35e Régiment, à Québec.

Implanter un manège militaire et sa flotte de véhicules en plein cœur d’une ville, c’est une chose. En faire un modèle d’efficacité énergétique, c’en est une autre. Concilier les deux, c’est un exploit. Ce pari, le ministère de la Défense nationale l’a relevé haut la main en se dotant, pour le coût de 10 millions de dollars, d’un bâtiment à fonctions multiples, associant à la fois des impératifs de sécurité nationale et des exigences environnementales parmi les plus rigoureuses, pour loger son 35e Régiment de génie de combat.

Si la finalité du projet allait de soi pour la Défense nationale, il en était autrement pour les concepteurs tant la tâche était loin d’être mince. D’abord parce que le manège militaire doit être implanté en plein cœur de Sainte-Foy, à la jonction de quartiers résidentiels et commerciaux. Ensuite parce que les notions de sécurité – des personnes, des installations et des renseignements – devaient teinter toutes les décisions de l’équipe de projet.

Le concept a donc été élaboré de manière à ce que le manège demeure étroitement associé au boulevard Hochelaga, tout en offrant la latitude nécessaire pour prolonger la rue de la Bièvre et ainsi rétablir la trame urbaine. Le bâtiment de 4 000 mètres carrés (m2) joue ainsi un rôle de jalon, assurant une transition équilibrée entre les gabarits plus réduits à l’est et les gabarits résidentiels plus imposants qui viendront prochainement le jouxter à l’ouest. Par son design, l’édifice fait en outre office de mur-écran, en minimisant les vues sur le stationnement militaire depuis le boulevard Hochelaga.

Architecture optimisée

Sur le plan architectural, le manège est conçu en deux parties articulées d’est en ouest selon les fonctions desservies. Suivant cet axe, on découvre tour à tour le point d’entrée, qui donne sur un hall ouvert sur deux niveaux, les bureaux, les salles de classe et une salle polyvalente de 600 m2, également sur deux niveaux, servant à la fois de gymnase et d’aire de rassemblement. La portion ouest regroupe par sa part l’entreposage et les aires d’entretien des véhicules.

« Tout ce qui est fonction publique et administrative est aménagé dans la partie est du rez-de-chaussée, alors que les fonctions militaires sont confinées dans la partie ouest, résume Marco Burelle, architecte sénior chez DFS architecture et design. À l’étage, on retrouve le quartier général, la salle de conférence et la salle mécanique. C’est également à ce niveau qu’est installée la salle de simulation de combat et ses écrans géants. »

Il précise que la salle de rassemblement et le simulateur de combat – que l’on pourrait comparer à un jeu vidéo à échelle humaine – ont quelque peu influencé le design. Le simulateur étant accolé au quartier général, les concepteurs ont dû insonoriser les cloisons de la salle, autrement aveugle, c’est-à-dire sans fenêtres. Dans le même esprit, ils ont opté pour une structure hybride faite d’acier et de bois lamellé-collé, dont la masse pleine vient atténuer la réverbération des sons en diminuant le parallélisme des ondes sonores dans la salle de rassemblement.

« Au départ, on n’avait pas de mandat acoustique pour le traitement du hall de rassemblement, note Marco Burelle. Il est venu plus tard, en cours de design, lors d’une rencontre avec les usagers. Il faut dire que cette salle sert à la tenue d’exercices militaires et à des rencontres protocolaires. En introduisant des poutres en bois, on venait pallier l’écho et rendre l’espace plus confortable sur le plan acoustique. »

Efficacité démontrée

C’est toutefois en matière d’efficacité énergétique que le manège se distingue le plus. En effet, de l’enveloppe du bâtiment, qui élimine les ponts thermiques, aux équipements mécaniques à haute efficacité, en passant par les luminaires à DEL, tout a été mis en œuvre afin d’en réduire au minimum les besoins énergétiques. À elle seule, la stratégie électromécanique permet ainsi de récupérer 95 % de l’énergie totale, sur une consommation de 52 % plus efficace que les valeurs prescrites par le Code modèle national de l’énergie pour les bâtiments (CMNEB).

Pour atteindre un tel niveau de performance, l’équipe de CIMA+ qui a accompagné l’architecte à travers les notions de thermodynamique, a misé sur diverses stratégies, dont l’aérothermie pour le chauffage et la climatisation. « C’est avant tout une question de coût qui a motivé ce choix, explique Sébastien Gaudreau, chargé de projet pour CIMA+. En partant, un système aérothermique est moins coûteux qu’un système géothermique.

« Les contraintes associées au chemin critique de construction ont aussi pesé dans la balance, fait-il valoir par ailleurs. La géothermie doit être faite en premier. On doit attendre qu’elle soit installée pour monter le toit, alors que l’aérothermie est mise en place en dernier. Et c’est très efficace. Là où une plinthe chauffante fournit un kilowatt de chaleur pour chaque kilowattheure consommé, l’aérothermie en fournira de 1,5 à 3 kilowatts selon la température extérieure. »

Mécanique sophistiquée

Ce système air-eau, qui alimente un réseau de conduites hydrauliques, est composé de deux thermopompes d’une capacité totale de 120 tonnes qui fournissent l’équivalent de 1,4 million de BTU en refroidissement et 1,7 en chauffage. Couplé à la ventilation, il participe au refroidissement des lieux en été et au chauffage en hiver. De plus, un échangeur d’air à récupération de chaleur réduit la consommation énergétique globale en récupérant 95 % de l’énergie contenue dans l’air exfiltré. Enfin, en périphérie, un système de chauffage complémentaire à basse température à l’eau chaude prend le relais en période de grands froids. « On s’est aussi préoccupés de récupérer la chaleur produite par les équipements de la salle de simulation immersive, mais aussi celle émise par la salle informatique, mentionne Sébastien Gaudreau. Pour y arriver, on a utilisé deux unités de ventilation, une centrale, l’autre périphérique.

« La chaleur produite par la zone centrale du bâtiment, poursuit-il, est rejetée dans le réseau hydraulique pour les besoins en chauffage de l’enveloppe. On devait en plus prendre en compte les aspects de sécurité liés aux activités du manège. Pour assurer la redondance des systèmes, on a donc eu recours à deux chaudières au gaz en appoint et à une génératrice pour garantir un service minimum. »

Cet ensemble de mesures éconergétiques a notamment permis au projet d’atteindre le niveau Or de la certification LEED-NC 2009 du Conseil du bâtiment durabe du Canada.

Équipe de projet
  • Client : Construction de Défense Canada
  • Architecture et aménagement paysager : DFS architecture et design
  • Ingénierie : CIMA+
  • Construction : Pomerleau
  • Consultation LEED : Lyse M. Tremblay ecoArchitecture