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Le nouvel édifice de TPSGC à Québec

14 février 2014
Par Marie-Ève Sirois

Un bâtiment durable à haute performance énergétique : l’édifice de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada de Pointe-D’Estimauville, à Québec.

Terminé depuis 2011, l’édifice de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC) du quartier Pointe-D’Estimauville fait toujours sourire ses exploitants, ceux qui paient notamment la facture énergétique du bâtiment de 29 990 mètres carrés, haut de neuf étages. Et pour cause ! Cette construction consomme environ 60 % moins d’énergie que la référence du Code modèle nationale de l’énergie pour les bâtiments (CMNEB). 

Conçu et construit en un temps record de deux ans, l’édifice TPSGC est « simple et efficace ». C’est ainsi que Pierre Martin, architecte et membre de l’équipe du promoteur, le qualifie. « À la suite de l’obtention du contrat, dit-il, nous avons produit les plans d’exécution à l’automne 2009. En décembre et janvier, nous étions en soumission et en février 2010, le chantier débutait. Treize mois plus tard, la construction était complétée et les 900 fonctionnaires emménageaient dans leurs nouveaux bureaux. » 

L’échéancier d’origine a été respecté à une semaine près. En fait, tout devait être en place pour que le promoteur puisse encaisser son premier mois de loyer. Son mandat consistait à concevoir, construire et exploiter le bâtiment pendant 20 ans, en échange d’une redevance mensuelle. Après quoi, l’infrastructure deviendra une propriété du gouvernement fédéral. 

Cette approche a donné lieu à une conception intégrée obligée entre les architectes, les ingénieurs et le gérant de chantier. Et lors d’une soirée tenue dans le bâtiment en novembre dernier, toute l’équipe vantait les vertus de cette mise en commun des expertises, pour un projet dont ils sont fiers, bien qu’il ait été réalisé rapidement. « Normalement, ce type de bâtiment nécessite quatre ans de travail. Nous avons réalisé TPSGC en moins de deux ans », note l’ingénieur Alexandre Dufresne, de Therméca. 

Pourtant, l’électromécanique de cet édifice à ossature de béton ne fait pas dans le standard, bien au contraire. Car l’efficacité énergétique et la rationalisation des équipements ont sans contredit marqué cette réalisation. « Nous avons minimisé le nombre d’échangeurs et de valves, qui engendrent des frais, mais aussi des pertes thermiques », précise l’ingénieur. Les systèmes de chauffage et de climatisation sont donc, à la fois, simples en ce qui a trait au nombre d’appareils, et complexes au regard des séquences de contrôles. 

Outre l’eau chaude sanitaire, tous les besoins en chauffage du bâtiment sont assurés par un seul réseau, qui distribue principalement sa chaleur par l’entremise  de planchers radiants sur les étages. La climatisation se fait par le biais de la ventilation, où les serpentins de refroidissement sont aussi alimentés par un seul réseau. 

Là où le concept surprend, c’est par l’utilisation de pompes à chaleur en cascades. Et comme première source de chaleur, c’est le bassin thermique infini de l’air qui est exploité. Ainsi, six thermopompes air/eau puisent la chaleur d’un mélange d’air vicié (1/3) et d’air extérieur (2/3). La chaleur extirpée est ensuite injectée sur le retour du réseau d’eau refroidie. Bien que les températures soient relativement basses, le coefficient de performance (COP) des thermopompes demeure tout de même entre 2,5 et 4,8. Il y a donc un gain significatif par rapport à un appareil de chauffage traditionnel, dont l’efficacité est de 100 %, au maximum. 

Sur les réseaux d’eau refroidie et d’eau chaude, deux refroidisseurs à vis, d’une puissance de 180 tonnes chacun, pompent la chaleur. Ces derniers produisent de l’eau à 45 °F tout au long de l’année alors que la température du côté chaud varie selon les besoins, de 100 à 120 °F. La chaleur précédemment rejetée sur le réseau froid par l’aérothermie est ensuite transférée vers le réseau de chauffage. 

Lorsque l’aérothermie ne suffit pas à la demande de chaleur, c’est la géothermie qui prend la relève. Une thermopompe (50 tonnes) alors puise la chaleur du sol pour la réinjecter sur la boucle d’eau refroidie. En été, la chaleur excédentaire peut être dissipée dans les 16 puits géothermiques. 

Pour compléter le système, trois chaudières à condensation fournissent la chaleur d’appoint. « Les séquences de contrôles priorisent la récupération de chaleur sur les gains internes, l’aérothermie, la géothermie et, en dernier recours, les chaudières, note Alexandre Dufresne. La mise en service a été laborieuse, mais une fois les séquences de contrôles maîtrisées, les performances sont au rendez-vous. » 

Parmi les défis rencontrés par l’équipe de projet, Pierre Martin met en relief une particularité du site : le bâtiment devait être érigé sur un sol d’argile instable avec une nappe phréatique située à moins de deux mètres de la surface du sol. « Assoir le bâtiment sous le niveau de la nappe phréatique était hors de question, indique l’architecte. Nous avons donc excavé environ 1,5 mètre, sans plus, et procédé à la compaction du sol. » Et pour les stationnements intérieurs qui auraient normalement été souterrains, ils ont été dissimulés sur trois étages et demi, derrière le hall d’entrée, vaste et tout en hauteur. 

Quant aux apprentissages tirés de ce projet, l’Ingénieur de Therméca souligne qu’une tonne de chauffage en aérothermie coûte 35 % moins cher à installer que la même puissance en géothermie. 

Si le projet était à refaire, Alexandre Dufresne utiliserait la modélisation des données de bâtiment (MDB ou, en anglais, BIM pour Building Information Modeling), maintenant que les outils logiciels sont disponibles. Il explique : « Les espaces dans les salles mécaniques étaient restreints et nous avons passé beaucoup de temps à planifier l’usage des espaces et prévoir les potentielles augmentations de capacité des équipements. La diversité des espaces (restaurants, laboratoires, salles de serveurs, aires ouvertes, salles de conférences) et les ajouts de dernière minute représentaient des défis importants pour nous. » 

Le 15 janvier 2013, l’édifice TPSGC obtenait la certification LEED-NC niveau Or, ce qui représentait une exigence contractuelle émise par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.


* Marie-Ève Sirois est cofondatrice d’Écobâtiment

Performances
  • 97 % des déchets de construction ont été détournés du site d’enfouissement
  • 52 % de réduction de la consommation d’eau potable par rapport aux critères LEED
  • Cote énergétique de 58,7 % sous le CMNEB

 

Mesures durables
  • Espaces de stationnement intérieurs et extérieurs pour les vélos
  • Bornes de recharge pour les voitures électriques
  • Tous les espaces de stationnement (185) sont intérieurs
  • Bassin de récupération des eaux pluviales (113 m3)
  • Toiture du stationnement végétalisée (750 m2)
  • Toiture principale à albédo élevé (1 979 m2)
  • Appareils sanitaires à faible débit avec détecteurs de mouvement
    • Toilette à  faible débit : 4,8 litres par chasse
    • Urinoir à faible débit : 0,5 litre par chasse
    • Douche à faible débit : 5,7 litres par minute
    • Lavabos et éviers de cuisine : 1,9 litre par minute
  • 16 puits géothermiques de 650 pieds
  • Aérothermie : 6 unités air-eau totalisant 120 tonnes
  • Entraînements à vitesse variable
  • Récupération de chaleur à partir de sources internes :
    • Salles des serveurs (250 kW)
    • Ascenseur
    • Cabinets de télécommunications
    • Salles électriques
  • Chauffe-eau et chaudières à condensation
  • Détecteurs de luminosité et de présence
  • Fluorescents T5 et T8 avec de faibles contenus en mercure et ballasts électroniques
  • Chauffage radiant à l’eau chaude
  • 14 % des matériaux de construction utilisés possèdent un contenu recyclé
  • 33 % des matériaux sont de provenance régionale
  • Facteur d’éclairage naturel d’au moins 2 % pour 82 % des espaces régulièrement occupés
  • Matériaux sans composés organiques volatils (COV) : adhésifs, produits d’étanchéité, peintures et recouvrements de plancher.

 

Équipe du projet
  • Locataire (20 ans) et client : Travaux publics et Services gouvernementaux Canada
  • Proposant et exploitant (20 ans) : Consortium GM développement/Ogesco/Pierre Martin Architectes
  • Architecture : Consortium M3 / Côté Chabot Morel / Pierre Martin Architectes
  • Architecture du paysage : Daniel Arbour et Associés
  • Génie électromécanique : Therméca
  • Consultation LEED : AEdifica
  • Génie structural : CIME Consultants
  • Gérance de construction : Ogesco Construction