Aller au contenu principal
x

Faire d’un parement ancestral un système innovant

5 mai 2021
Par Rénald Fortier

Conjuguer le passé au futur durable. Voilà l’essence d’une démarche d’innovation ayant mené au développement d’un système de parement en aluminium inspiré de la tôle dite à la canadienne.

Au croisement des rues du Pont et Fleurie, dans l’arrondissement historique du Vieux-Québec, s’élève désormais la nouvelle Maison de Lauberivière, un établissement voué à l’hébergement et à la réinsertion sociale de personnes sans abri. Et bien qu’il soit résolument contemporain, ce bâtiment durable de sept étages s’insère néanmoins harmonieusement dans son environnement du vénérable quartier Saint-Roch, grâce à son parement en aluminium anodisé sans nul autre pareil.

Il faut dire que la mise au point de cet habillage métallique est le fruit d’une démarche de recherche et développement qui se sera étalée sur environ trois ans à partir de 2017. Et qu’elle aura bénéficié d’un appui financier de la Société d’habitation du Québec pour favoriser la démonstration de nouveaux produits en aluminium dans le cadre de la réalisation de projets AccèsLogis Québec, conformément à la mesure sur l’exemplarité de l’État de la Stratégie québécoise de développement de l’aluminium 2015-2025.

« La tôle à la canadienne, un revêtement unique au Québec, est bien présente sur les façades et les toitures des immeubles dans l’arrondissement. Nous nous en sommes donc inspirés pour réinventer un système de parement qui permet d’intégrer le bâtiment du mieux possible dans son milieu historique, en plus d’être durable dans le temps, de ne nécessiter que peu d’entretien et d’être facilement recyclable en fin de vie utile », indique Francis Fortin, associé de Lafond Côté architectes, firme qui a vu à la conception du nouveau domicile de la Maison de Lauberivière, projet dont la réalisation a été pilotée par le groupe de ressources techniques Action-Habitation de Québec.

Francis Fortin, associé de Lafond Côté Architectes. Photo : Lafond Côté Architectes

Pour développer un tel système, qui présente l’avantage de n’exposer aucune attache, Lafond Côté a fait équipe avec Moulures Modernes, pour la fourniture et la transformation de l’aluminium, et Alumico, pour l’anodisation. Et de croquis en tests effectués sur des maquettes en usine, on en est arrivé à concevoir des panneaux de plus grande dimension – ils atteignent presque sept pieds de haut dans la partie supérieure des façades – que ceux en tôle à la canadienne traditionnelle.

Optimiser le système

« Faire des panneaux plus grands, ça veut aussi dire plus épais, plus lourds et plus coûteux. En travaillant avec des plis, nous avons cependant réussi à rigidifier le métal pour réduire leur épaisseur à 2 mm, soit 1,2 mm de moins que si on avait utilisé des panneaux d’aluminium dits à cassette. C’est une économie qui se reflète sur toute la surface du bâtiment et qui est significative quand on travaille sur un projet à caractère social », note l’architecte Francis Fortin, en précisant qu’il a aussi fallu développer toutes les composantes secondaires du système, comme les linteaux, les tablettes et les solins, avec une même épaisseur de 2 mm et avec le même aluminium.

Les panneaux ont également été pourvus d’une petite encoche dans leur partie inférieure, de façon à permettre de les enligner facilement lors de la pose. Ils seront ensuite vissés sur un profilé en omega, fixé sur un profilé en Z retenu par une attache T-Clip au colombage métallique. Ce système d’attache fait en sorte que le métal pourra se dilater et se contracter, sous l’effet des variations de température, sans pour autant affecter le canevas du parement.

Le parement innovant de la Maison de Lauberivière s’inspire de la tôle dite à la canadienne. Photo : Lafond Côté architectes

Pour protéger le revêtement métallique contre les agents de détérioration, les partenaires engagés dans la démarche de R et D ont choisi de recourir à l’anodisation, qui reproduit un processus naturel d’oxydation de l’aluminium, mais de façon contrôlée et stabilisée. « Nous avons utilisé un alliage d’aluminium [5052] qui est souvent exclu dans la construction parce que, comme sa composition contient plus de magnésium et de chrome par rapport à un alliage standard [5005], le résultat n’est pas nécessairement uniforme d’un panneau à un autre suivant l’anodisation, indique Francis Fortin.

« Nous avons néanmoins décidé d’aller de l’avant avec cet alliage et ses variations de teintes puisqu’il représente bien la clientèle variée de l’établissement. De plus l’anodisation donne une teinte légèrement verdâtre plus chaude au matériau, sans compter que son utilisation s’accompagnait d’une économie monétaire substantielle », conclut l’architecte québécois, en soulignant que le système de parement développé pour la Maison de Lauberivière avait passé haut la main tous les tests effectués en laboratoire chez UL, à Varennes.

Le système déchiffré

5 250    Nombre (approx.) de panneaux

1 400    Nombre (approx.) de moulures

2,0       Nombre de mm d’épaisseur

0,2       Hauteur des panneaux, en mètres, à partir du bas du revêtement inférieur (elle varie selon une progression du bas vers le haut)

2,1       Hauteur des panneaux, en mètres, dans la partie supérieure du revêtement