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Récupérer la chaleur des égouts

12 avril 2012
Par Francis Pronovost*

Regard sur une nouvelle variante de la géothermie : la récupération de la chaleur des effluents rejetés dans les égouts par les bâtiments. 

La géothermie, en puisant la chaleur du sol, offre un rendement fort intéressant pour le chauffage de l’espace et la production d’eau chaude domestique. Tout comme sa variante consistant à aller puiser la chaleur dans un lac ou une rivière. De la même façon, de nouvelles technologies permettent maintenant d’aller récupérer l’énergie des effluents rejetés dans les égouts par les bâtiments. Il est intéressant de souligner que dans ce dernier cas, les pompes à chaleur atteignent un niveau de performance plus élevé que pour la géothermie, bénéficiant d’une source de chaleur à plus haute température, soit les effluents, qui sont généralement entre 12 °C et 20 °C.

La façon de faire la plus fréquente consiste en l’installation d’une boucle glycolée dans une conduite d’égout. La boucle peut être ajoutée à une conduite existante, d’un diamètre minimum de 800 mm, ou faire partie intégrante d’une nouvelle conduite, d’un diamètre minimum de 400 mm. Les tuyaux de la boucle sont placés dans la partie inférieure des conduites, de façon à pouvoir collecter de la chaleur même lorsque le débit des effluents est faible. Une plaque d’acier inoxydable recouvre les tuyaux afin de les protéger, ce qui assurerait au système une durée de vie de 30 à 50 ans.

Certaines conditions maximisent la rentabilité d’une installation avec boucle de récupération de chaleur. Entre autres, il faut que le bâtiment qui utilisera la chaleur soit situé à moins de 250 mètres d’une conduite d’égout ayant un débit d’effluent d’au moins 12 l/s, correspondant aux rejets d’environ 8 000 à 10 000 habitants. La puissance minimale de la pompe à chaleur est de 150 kW et le bâtiment doit pouvoir utiliser une chaleur produite à moins de 65 °C.

Quelques dizaines de projets avec boucle glycolée ont déjà été réalisés dans le monde, dont plusieurs en Europe. Par exemple, à Winterthur, en Suisse, les échangeurs installés dans une conduite de 78 m permettent de fournir 70 % de la chaleur requise par 400 appartements par l’entremise d’un réseau de chaleur.

Une façon moins fréquente de récupérer la chaleur des effluents consiste à faire circuler ceux-ci directement dans une pompe à chaleur. Le premier projet de ce genre en Amérique a été complété en 2010 afin de fournir 80 % de la chaleur requise par le nouveau quartier vancouvérois Southeast False Creek, où se trouve le village olympique. À même la nouvelle station municipale de pompage des effluents du quartier, une pompe à chaleur injecte les calories récupérées dans un réseau de chaleur. Pas moins de 3,5 MW de chaleur sont ainsi produits en continu par la pompe thermique.

Le principal défi que pose cette technique consiste à s’assurer de la propreté de l’échangeur de chaleur de la pompe thermique – ce qui est fait au moyen d’un filtre retenant la partie solide des effluents –  afin de permettre en tout temps un bon transfert de chaleur. Après la récupération de la chaleur, les parties solides et liquides sont recombinées pour leur élimination. De plus, le flot des effluents dans l’échangeur de chaleur est régulièrement inversé pour éviter l’accumulation de matières solides. L’échangeur, qui est de type coque et tube, est également muni d’un système de brosses automatiques qui récurent périodiquement les surfaces d’échange.

Peu importe le type de système utilisé pour la récupération de la chaleur des eaux usées, il faut voir à ce que la température des effluents se maintienne à plus de 8 °C à la station d’épuration des eaux. Sous cette température, le traitement biologique risque d’être affecté. À cet effet, les systèmes installés ne soutirent habituellement que quelques degrés des effluents, voire un seul degré. Il est intéressant de souligner qu’un système de récupération de chaleur des effluents peut, dans certains cas, permettre la climatisation, par le rejet de chaleur dans les effluents.

*L’auteur est expert-conseil en énergie et bâtiment chez Écobâtiment.

Pour en savoir plus :

http://www.lyonnaise-des-eaux.fr/collectivites/nos-offres/des-exemples-de-realisation

http://www.districtenergy-digital.org/districtenergy/2008Q3/#pg22