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L’importance des espaces intermédiaires au temps de la COVID-19

14 avril 2020
Par Mojtaba Parsaee*

Écobâtiment CHRONIQUE DE ÉCOBÂTIMENT
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L’actuelle crise de la COVID-19 met en relief l’importance de favoriser des interactions saines et durables avec l’environnement extérieur dans la conception des bâtiments.

Rester à la maison et pratiquer la distanciation sociale pendant plusieurs semaines sont les principales stratégies pour lutter contre la COVID-19 qui sévit partout sur la planète. Cela nous rappelle une leçon architecturale importante : la connexion entre les espaces intérieurs et les environnements extérieurs au moyen d’espaces intermédiaires permet aux gens de profiter de la nature de manière conviviale et en toute sécurité.

Les populations ayant expérimenté le confinement sont apparues sur les balcons et les toits, et même les fenêtres, pour chanter, danser, discuter et jouer ensemble. Elles souhaitaient rester un peu dehors et profiter de l’air frais, de la lumière naturelle et de la vue sur les environnements extérieurs, en plus d’exprimer leur gratitude au personnel de santé. Fait intéressant, un homme en France a couru un marathon sur son balcon pendant l’actuelle crise sanitaire… Tout cela démontre qu’il est essentiel pour les êtres humains d’avoir des connexions directes avec la nature extérieure.

 Une manifestation architecturale plausible de ces comportements est que les bâtiments doivent comporter un espace ouvert ou semi-ouvert, comme les balcons, pour permettre aux gens de profiter de la nature et de se rapprocher de leur environnement extérieur sans pour autant y être complètement immergés. Dans le contexte architectural, ces espaces sont généralement appelés intermédiaires, car ils se situent entre les espaces intérieurs et les environnements extérieurs. Les espaces intermédiaires sont la frontière entre le sentiment de liberté que procurent les environnements extérieurs et le sentiment d’être protégé ou abrité par les murs à l’intérieur d’un bâtiment.

Le concept de l’espace intermédiaire © Mojtaba Parsaee

La pandémie du coronavirus témoigne de la valeur des espaces intermédiaires dans nos bâtiments résidentiels et institutionnels, ceux-ci fournissant des connexions directes, dans un environnement contrôlé, avec l’extérieur.

Quelques minutes d’exposition à l’extérieur, sur les balcons, peuvent être bénéfiques tant sur le plan psychique que physique.Photo : ©Provided by Evening Standard

Quelques minutes d’exposition dehors, sur les balcons ou sur les toits, peuvent être bénéfiques sur les plans psychique et physique, en plus de procurer une sensation de liberté, notamment en cette période difficile de crise et de confinement. Nous réalisons aussi que nous ne pouvons pas être isolés en permanence de l’environnement extérieur et de la nature. Cela dit, il importe de rappeler que les espaces intérieurs peuvent être enrichis grâce à des éléments biophiliques tels que les plantes, les couleurs vivantes et les matériaux naturels.

D’autre part, on peut constater que des espaces intermédiaires temporaires sont actuellement créés pour faciliter la désinfection des lieux et les procédures sanitaires mises en place en situation de pandémie. Voilà un autre signe de l’importance de considérer l’intégration d’espaces intermédiaires dans la conception de projets neufs ou la valorisation des bâtiments existants. Que ce soit pour mieux contrôler le froid, le vent, les saletés, la neige, la pluie, l’apport solaire ou encore les virus, l’espace intermédiaire remplit plusieurs fonctions pertinentes au maintien des conditions sanitaires souhaitées en plus de procurer davantage de bien-être aux usagers. L’efficacité énergétique et l’aérothermie tire également profit des espaces intermédiaires.

Approche résiliente et durable

Avant la crise de la COVID-19, il était possible de sortir dehors lorsque nous le désirions. Que ce soit pour aller au travail, visiter quelqu’un ou faire une activité, nous avions donc la chance d’être exposés à un environnement extérieur au cours de déplacements quotidiens.

Les espaces intermédiaires peuvent favoriser la vitalité et la vivacité des bâtiments lors d’événements catastrophiques comme la pandémie de COVID-19. Photo : ©Ryan Uytdewilligen

Maintenant que nous vivons le confinement à une échelle sans précédent, le développement d’espaces intermédiaires dans les bâtiments constitue une approche résiliente et durable, de par ses multiples atouts. D’après les comportements des gens, les espaces intermédiaires peuvent favoriser la vitalité et la vivacité des bâtiments lors d’événements catastrophiques comme la pandémie de COVID-19.  Ils peuvent aussi offrir davantage de bien-être aux aînés et autres personnes vulnérables qui ont des besoins particuliers et qui passent beaucoup de temps à l’intérieur des bâtiments, même en temps normal. Les espaces intermédiaires confèrent un lieu sûr et facilement accessible dans lequel ils peuvent entrer en contact avec la nature et le milieu de vie élargi.

Au Québec, les espaces intermédiaires doivent être développés en portant une attention particulière aux considérations climatiques. Il est donc impératif d’en concevoir avec certaines protections contrôlables et ajustables pour limiter, par exemple, l’accumulation de neige et la vitesse du vent. Par ailleurs, les espaces intermédiaires peuvent être équipés avec des appareils de chauffage temporaires ou permanents pour en faciliter l’usage et l’entretien.

La crise de la COVID-19 se terminera éventuellement, mais nos bâtiments resteront. Dans cette période de confinement, le temps est propice à la réflexion architecturale de nos milieux de vie. Et si une conception résiliente et basée sur les apprentissages du présent et du passé pouvait nous aider à traverser ce type d’événement plus sereinement?  La conception de nos bâtiments peut favoriser des interactions saines et durables avec l’environnement extérieur.


*L’auteur est chargé de projet chez Écobâtiment