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Jouer la carte du mentorat en écoconception

7 avril 2021

Par Marie Gagnon*

Quand le développement de la relève en écoconception passe par le mentorat. L’exemple de la firme de génie électromécanique et bioclimatique Pageau Morel.

Tournant des années 2000. L’ingénieur en mécanique Roland Charneux, véritable apôtre de l’économie d’énergie dans les bâtiments commerciaux et institutionnels, intègre l’écoconception à sa pratique alors qu’il est appelé à laisser son empreinte sur des réalisations qui contribueront à jeter les bases du mouvement en faveur du bâtiment durable au Québec. Comme le magasin Mountain Equipement Co-op de Montréal, le pavillon Richard J. Renaud de l’Université Concordia ou encore le Complexe des sciences de la vie de l’Université McGill, pour ne citer que ces exemples.

Et il ne tarde pas à faire de cette approche conceptuelle le crédo de Pageau Morel, dont il est à l’époque vice-président exécutif. « Roland était alors non seulement un pionnier en conception écoresponsable, mais il avait aussi la volonté, de concert avec ses associés Jacques De Grâce et Claude Giguère, de nous entraîner dans son sillage en s’appuyant sur le mentorat », indique Nicolas Lemire, aujourd’hui président de cette firme qui en est à sa quatrième génération de dirigeants.

Un savoir à partager

Mentorat. Voilà le mot clé est lâché. Et c’est pourquoi, poursuivant l’hyperspécialisation de ses troupes, Pageau Morel a mis sur pied l’équipe Solutions créatives, au printemps 2019, afin d’encadrer le développement de ses ressources en matière d’écoconception.

Pour cristalliser sa vision globaliste du bâtiment durable, mais aussi pour assurer le développement d’une nouvelle génération d’ingénieurs, Pageau Morel a créé une nouvelle équipe constituée des ingénieurs Jacques Lagacé et Roland Charneux. Cette démarche s’inscrit dans un mouvement d’hyperspécialisation entamé en 2009 par la firme.

« Le but, c’est de mieux diffuser l’information et les connaissances en matière de conception intégrée, explique Roland Charneux, aujourd’hui directeur adjoint. On s’intègre à l’équipe de projet au tout début pour faire partager notre expérience. En fait, on joue un double rôle de mentor : d’un côté, on apporte des idées, de l’autre, on valide celles émises par nos jeunes ingénieurs, qui prennent ainsi de l’assurance et gagnent en confiance. C’est tout aussi profitable pour le client, qui peut alors prendre des décisions éclairées, puisque toutes les options auront été envisagées. Enfin, c’est aussi une façon de conserver nos savoirs et d’assurer la relève de l’entreprise. »

Cette initiative arrive à point nommé, indique Roland Charneux. En effet, il constate depuis quelques années que les nouveaux diplômés ont une conscience environnementale beaucoup plus grande que celle de leurs prédécesseurs. Ils cherchent donc à intégrer les rangs de firmes qui mettent à l’avant-plan l’impact du bâtiment sur l’environnement. Et chez Pageau Morel, l’écoconception est loin d’être une mode passagère, bien au contraire.

 Une tendance lourde

« On a commencé à s’intéresser à l’écoconception il y a plus de vingt-cinq ans, rappelle Roland Charneux. Pour nous, tous les projets, petits ou grands, peuvent être abordés sous l’angle de l’écoconception, mais pas au même niveau. En regroupant nos talents au sein d’équipes hyperspécialisées, comme Solutions créatives, on répond aux besoins de nos clients, qui cherchent des experts dans leur domaine. Et ça donne de meilleurs produits au final. » Il ajoute que l’écoconception repose souvent sur des technologies de pointe et des approches novatrices. Et qu’à celles-ci sont associées des risques potentiels auxquels le client doit consentir.

Par exemple, pour améliorer le bilan environnemental d’un bâtiment, on va bien sûr optimiser l’enveloppe, mais on va aussi intégrer des pompes à chaleur et miser sur l’inertie thermique des dalles de béton. « Au magasin MEC du Marché central, on a même installé des citernes pour récupérer l’eau de pluie. Mais pour cela, il faut d’abord obtenir l’adhésion du client. »

Une vision affinée

Autant de réalisations qui ont permis à la firme d’affiner sa vision de l’écoconception, souligne au passage Roland Charneux. « L’écoconception, c’est d’abord réduire les ressources externes, comme la consommation électrique, en concevant une enveloppe ultraperformante et en misant sur une fenestration abondante pour profiter de l’éclairage naturel et maximiser les gains solaires en hiver, tout en mettant en place des solutions pour emmagasiner cette chaleur et la restituer plus tard.

 « Mais il faut aussi instaurer une meilleure mixité quand on développe de nouveaux quartiers et combiner les différentes fonctions pour profiter de synergies sur le plan énergétique, poursuit-il. Par exemple, la chaleur générée par un centre de données pourrait être récupérée pour chauffer l’eau chaude d’un pâté de maisons. Il reste quand même beaucoup de chemin à faire en conception intégrée, et parfois on n’a pas toute la flexibilité souhaitée dès le départ. Mais j’ai confiance en nos jeunes. Ils ont la vision, l’intérêt et la motivation pour faire bouger les choses. »


*Avec la collaboration de Rénald Fortier