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Les pavillons Bellini et Goodman de l’Université McGill

8 mars 2010
Par Rénald Fortier

Le design durable des deux nouveaux pavillons du complexe des sciences de la vie de l’Université McGill.

Hiver 2006. L’Université McGill donne le coup d’envoi de la construction du pavillon Francesco Bellini des sciences de la vie et du Centre de recherche sur le cancer Rosalind et Morris Goodman, un projet de 73 millions de dollars. Ils se grefferont deux ans plus tard aux pavillons McIntyre des sciences médicales et Stewart des sciences biologiques, deux édifices datant des années 60, pour ainsi former le nouveau Complexe des sciences de la vie de l’institution montréalaise.

Les deux nouveaux édifices, dont les volumes s’imbriquent l’un dans l’autre, totalisent près de 200 000 pieds carrés. Le volume de cinq étages du pavillon Bellini, en forme de « L », s’insère entre le pavillon Stewart, l’édifice de la Faculté de Droit et la bibliothèque du pavillon McIntyre. Axé perpendiculairement, le volume de sept étages du pavillon Goodman se situe pour sa part entre le pavillon McIntyre et des résidences historiques du Mille-Carré-Doré. Comme il suit une pente descendante d’une soixantaine de pieds, il projette vers le mont Royal une façade haute de seulement trois étages.

 L’édification de ces pavillons, soulignons-le, visait un triple objectif : réunir les composantes des facultés de médecine et des sciences ; créer un lien physique entre les pavillons existants ; et favoriser la synergie interdisciplinaire. En prime, elle aura été l’occasion pour l’Université McGill d’emboîter le pas à un mouvement en faveur du bâtiment durable qui commençait alors à s’animer au Québec. Avec la certification LEED-NC, niveau Argent (33 à 36 points sur les 70 possibles), comme point de mire.

C’était en 2004. De fil en aiguille, cependant, l’équipe de projet réussira à relever sensiblement la teneur écologique du projet tout en demeurant à l’intérieur des limites budgétaires définies par le client. Si bien  c’est plutôt la cible Or qui finira par apparaître sur l’écran radar.

Virage vert
Un grand projet vert, donc, mais pour lequel on n’aspirait pourtant pas à la certification LEED au départ. Du moins jusqu’à ce que l’équipe de conception soulève cette possibilité en cours de route. « L’idée a été très bien reçue par la direction de l’Université, qui y était dès lors prête à prendre le virage vert au niveau de son parc immobilier », relate Marie-Claude Lambert, chargée de projet au sein du consortium réunissant les firmes d’architectures Provencher Roy + Associés Architectes, de Montréal, et Diamond and Schmitt, de Toronto.

Et de renchérir Jean Ouellet, de Decasult, gestionnaire du projet : « Il y a avait certes un coût additionnel à viser LEED, mais il était somme toute léger. Le concept initial n’avait pas à être repris à partir de zéro puisqu’il comportait plusieurs mesures écologiques sur le plan de la qualité des espaces, par exemple un apport très important de luminosité naturelle. Il a simplement dû être ajusté pour mener à la réalisation d’un projet vert reconnu comme tel. »

L’équipe de projet s’est donc attelée à tâche pour réussir à livrer des bâtiments vert foncé et atteindre l’objectif LEED, appuyant notamment sur l’optimisation de l’efficacité énergétique des installations. Un défi en soi puisqu’elles incluaient 90 laboratoires, locaux très énergivores s’il en est puisque soumis d’ordinaire à 10 changements d’air à l’heure. Et qui fut relevé avec brio, tant du côté de la performance de l’enveloppe que du design électromécanique (récupération de chaleur, réduction du nombre de changements d’air dans les labos, etc.) quand on sait aujourd’hui que les pavillons consomment 38 % moins d’énergie que le bâtiment de référence conforme au Code modèle de l’énergie pour les bâtiments.

 L’application de nombreuses autres mesures est également venue verdir le concept : toitures végétale pour le pavillon Goodman et blanche pour le pavillon Bellini ; matériaux à contenu recyclé ; matériaux et produits à faible émissivité de COV… Sans oublier celles qui ont plus particulièrement conduit à une réduction de 50 % de la consommation d’eau potable – la cible initiale était de 30 % –  comme la réutilisation des eaux de pluie,  le recours à des appareils de plomberie à faible débit ou le design d’un aménagement paysager extérieur sans irrigation.

Design intégré
C’est en recourant à une approche de design intégré, à des charrettes de conception et à des séances de gestion de la valeur que l’on a réussi à s’assurer de l’inclusion d’une panoplie de stratégies durables au concept. En plus de mesurer l’impact que certaines décisions pourraient avoir sur les frais d’exploitation et l’entretien des installations tout au long de leur vie.

« Nous avons eu des rencontres régulièrement durant tout le processus de conception. Tous les professionnels étaient autour de la table, les gens responsables du service des immeubles de McGill aussi, tout comme les représentants des usagers des futurs pavillons. C’est une façon de faire qui a à coup sûr permis de bonifier le projet », indique Marie-Claude Lambert, pour qui l’une des principales particularités du projet, hors considérations écologiques, demeure son implantation.

 Elle explique : « Nous avons proposé d’implanter les pavillons sur un site qui posait dès le départ un grand défi, tant il était exigu et nous laissait peu de marge de manoeuvre. Non seulement les deux nouveaux bâtiments devaient-ils venir se faufiler entre des bâtiments existants, au surplus au-dessus d’un stationnement souterrain, mais aussi s’intégrer au bas du versant sud du mont Royal. »

Fermant la parenthèse pour revenir au mode collaboratif, elle note que cette approche a présidé également toute la phase de construction. Et qu’avec le concours de l’entrepreneur général, Pomerleau, la gestion des déchets sur le chantier a atteint une performance hors du commun, les débris ayant été détournés de l’enfouissement dans une proportion de plus de 96 %.

 Saisissant la balle au bond, Nadine Léonard, directrice de projet chez Pomerleau, souligne que la configuration du site ne permettait pas l’installation de plusieurs conteneurs pour trier les déchets de construction sur place. « Nous avons fait le travail avec trois conteneurs, tandis que le tri et la récupération se sont fait chez Melimax, qui nous fournissait des rapports détaillés sur la disposition des matières. »

Elle souligne, comme les autres acteurs du projet interviewés, que la mise en oeuvre du projet s’est très bien déroulée, du moins sans accrocs majeurs, même si plusieurs de ses artisans en étaient alors à une première expérience dans le domaine de la construction écologique.

Équipe de projet

Propriétaire Université McGill


Gestionnaire de projet Decasult

Architecture et consultation LEED Diamond and Schmitt Architects inc./ Provencher Roy + Associés Architectes

Architecture du paysage Claude Cormier Architectes paysagistes

Génie électromécanique et énergie Pageau Morel

Génie de structure et civil SDK

Protection incendie (ingénierie) Civelec

Entrepreneur général Pomerleau

Entrepreneurs spécialisés La Cie Électrique Britton (électricité) – Les Entreprises de réfrigération LS (ventilation) – F. Paquette et Fils et Maurice Denis et Fils (plomberie) – Regulvar (contrôles)

 

En chiffres
  • 96,4 % Proportion des déchets de construction détournés l’enfouissement
  • 75,5 % Part de la lumière naturelle dans les espaces
  • 54,0 % Réduction de la consommation d’eau
  • 38,0 % Réduction de la consommation énergétique par rapport à l’édifice de référence du Code modèle national de l’énergie pour les bâtiments
  • 24,9 % Contenu recyclé (post-consommation des matières et post-fabrication)
  • 23,4 % Matériaux d’extraction et de provenance régionale

Mesures durables
  • Intégration harmonieuse sur un site bordé par des résidences historiques et le patrimoine naturel du parc du mont Royal
  • Accessibilité au transport collectif
  • Aucun stationnement ajouté à l’extérieur
  • Toiture verte pour le pavillon Goodman
  • Toiture réfléchissante (membrane blanche) pour le pavillon Bellini
  • Éclairage extérieur ne générant pas de pollution lumineuse
  • Aménagement paysager, au sol et au toit, ne nécessitant aucune irrigation
  • Utilisation de l’eau de pluie récupérée pour réduire l’utilisation d’eau potable des toilettes et urinoirs
  • Appareils de plomberie à faible débit
  • Compteurs d’eau pour mesurer les économies réalisées et assurer le bon fonctionnement du système de plomberie
  • Ventilateurs et hottes à débits variables
  • Échangeurs de chaleur
  • Récupérateur de chaleur sur les refroidisseurs
  • Contrôles de présence et de luminosité pour l’éclairage
  • Enveloppe et vitrage performants
  • Mise en service des systèmes mécanique et électrique
  • Refroidisseurs et systèmes de sécurité incendie exempts de halon, CFC et HCFC
  • Apport important de luminosité naturelle
  • Plan de contrôle de la qualité de l’air et de propreté des espaces appliqué durant la construction
  • Nettoyage du bâtiment par une purge d’air neuf au terme des travaux
  • Matériaux et produits à faible émissivité de COV
  • Et autres