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L'optimisation éconergétique du Complexe Desjardins

15 mars 2010
Par Rénald Fortier

Vingt millions de dollars plus tard, le Complexe Desjardins n’a désormais rien à envier aux immeubles les plus performants sur le plan de l’efficacité énergétique.

En 2005, Place Desjardins inc. – aujourd’hui Desjardins Gestion immobilière (DGI) – s’attaque de front à l’optimisation de l’efficacité énergétique du complexe Desjardins, dont l’inauguration remonte au milieu des années 70. La tâche est loin d’être mince quand on sait qu’il s’agit là du plus grand édifice de Montréal avec ses quatre millions de pieds carrés répartis dans trois tours de bureaux (27, 32 et 40 étages), trois niveaux de stationnement souterrains, une galerie commerciale, une grande place publique et un hôtel adjacent en copropriété.

La démarche s’articulera essentiellement autour de la modernisation des équipements électromécaniques du bâtiment. Quoique certaines interventions ayant une incidence sur la réduction de la consommation énergétique aient déjà été effectuées ça et là – ou demeurent encore à l’être – dans le cadre de travaux d’amélioration, de revitalisation et de mise aux normes ayant cours depuis une quinzaine d’années.

C’est qu’au tournant des années 2000, le moment est venu de voir au remplacement progressif des systèmes électromécaniques originaux du bâtiment, mis en service voilà maintenant près de 25 ans. Mais comme d’autres investissements se révèlent encore plus pressants, et puisque les équipements électriques et mécaniques ont toujours été bien entretenus, on convient qu’il est facilement possible d’en allonger encore de quelques années la vie utile.

En 2005, la modernisation des équipements électromécaniques n’est toutefois plus une option, elle s’impose. D’où la décision de Desjardins d’y investir 20 millions de dollars, une démarche qui portera à quelque 100 millions de dollars les sommes injectées dans l’édifice à compter de 1993. Et celle aussi de profiter de l’occasion pour optimiser la performance énergétique du vaste complexe du centre-ville montréalais.

« L’efficacité énergétique faisait depuis longtemps l’objet d’une attention particulière au complexe Desjardins, note le directeur principal immeubles de DGI, Jean Ruest. Mais là, l’heure était venue d’accentuer grandement les efforts déployés en ce sens. Surtout que des hausses du coût de l’électricité étaient attendues. »

 L’objectif visé par l’entremise du programme de modernisation des équipements électromécaniques est pour le moins ambitieux : réaliser une économie énergétique de 15 % par an, à savoir 20 millions de kWh, par rapport à l’année de référence 2005. Et, du coup, retrancher 600 000 dollars à une facture énergétique s’élevant alors à 6,4 millions de dollars.

Une batterie d’interventions sera donc successivement mises en œuvre pour atteindre la cible : installation d’un nouveau système d’eau refroidie, mise en place de refroidisseurs à haute efficacité, etc. Sans compter la poursuite en parallèle d’un vaste programme portant sur la modernisation des systèmes d’éclairage.

« Nous réalisons une économie d’énergie substantielle dans les tours de bureaux, tout en maintenant le confort des usagers, précise Jean Ruest, en remplaçant les fluorescents T-12 par des T-8 ainsi que les ballasts magnétiques par d’autres électroniques. De même qu’en réduisant d’environ la moitié l’intensité lumineuse, qui était de 1 000 lux au pied carré, ce qui permet d’installer un ballast pour deux appareils d’éclairage et une lampe par luminaire plutôt que deux, le tout jumelé à une lentille parabolique hyper-performante. »

 

Solution originale
Le programme d’investissement dans les équipements électromécaniques du complexe Desjardins aura été l’occasion de recourir à un concept innovateur, très efficace sur le plan énergétique : la récupération de la chaleur produite par l’équipement informatique, l’éclairage et les occupants pour chauffer l’enveloppe du bâtiment, apporter de façon économique l’humidité nécessaire et chauffer l’apport d’air extérieur.

L’application de cette solution, proposée par la société d’ingénierie Pageau Morel et associés (PMA), a été d’abord été dirigée vers la tour Nord. Complétée au printemps 2006, elle a consisté principalement en l’installation d’une thermopompe de 400 tonnes dans la salle mécanique et à positionner de façon originale les équipements électromécaniques. Raccordée au réseau d’eau refroidie des unités de climatisation d’étage, cette thermopompe réduit la charge de refroidissement du refroidisseur et de la tour d’eau.

L’une des particularités de cette solution, indique-t-on chez PMA, tient à l’installation de serpentins de chauffage en amont des serpentins électriques, afin d’utiliser ces derniers en deuxième étape de chauffage seulement, et au remplacement des humidificateurs à eau chaude par d’autres de type évaporatif.

Mais sa plus grande originalité vient de la mise en place de tels humidificateurs en amont des ventilateurs de retour de manière à en réduire la taille. Le volet d’air évacué est complètement fermé lors de l’humidification et la chaleur du retour sert à évaporer l’eau, réduisant ainsi la température de retour et la demande de climatisation.

On calcule qu’il en découle une réduction des dépenses en énergie de quelque 2,8 millions de kWh par an, soit un abaissement du coût en énergie annuel de 141 176 à 9 215 dollars. Une performance qui va d’ailleurs dans le sens des résultats affichés par la démarche de modernisation des équipements électromécaniques dans son ensemble.

Des chiffres ? De 138 millions de kWh en 2005, la consommation électrique annuelle du complexe Desjardins était déjà passée sous la barre des 120 millions de kWh à la fin de 2008. Une réduction de 17 millions de kWh – l’équivalent de la consommation électrique annuelle de 705 maisons unifamiliales – qui représente un gain d’efficacité de 13,2 %.

« L’économie s’élève à ce jour à 590 000 dollars, signale Jean Ruest, en calculant que la réduction de notre consommation se chiffre à 270 000 dollars et que notre programme de modernisation nous a permis de contrer deux augmentations tarifaires successives d’Hydro-Québec. »

Il ne doute pas un seul instant que la cible fixée au départ sera atteinte. D’autant plus que la mise en œuvre du programme se poursuivra jusqu’en 2011, tout comme la mise à niveau du système d’éclairage. Sans compter que l’efficacité des composantes électromécaniques de l’édifice sera optimisée en continu dans la foulée d’une démarche de recommissioning.

En considérant une assistance financière estimée à 3,5 millions de dollars d’Hydro-Québec, par l’entremise de son programme d’optimisation énergétique des bâtiments pour les grandes entreprises, l’investissement consacré à l’amélioration de l’efficacité énergétique du complexe Desjardins pourra être recouvré sur une période de 5 à 7 ans.

« L’opération n’en sera que plus rentable et durable, fait remarquer en concluant Jean Ruest, parce que nous pourrons bénéficier de nouveaux équipements performants dont la vie utile pourra s’étaler sur une période de 20 à 30 ans, compte tenu de l’entretien préventif assidu dont ils feront l’objet. »

Équipe de projet

Client et représentant du propriétaire Desjardins Gestion immobilière
Ingénieurs Pageau Morel
Entrepreneurs Lambert-Somec / HVAC / Entreprises de réfrigération LS (1997) / Trane Québec

 

L’optimisation déchiffrée

Investissement 20 millions de dollars
Réduction de la consommation énergétique 18 millions de kWh (cible 2012 : 20 M kWh)
Gain d’efficacité 13,2 % (cible 2012 : 15 %)
Économie 590 000 $ (cible 2012 : 600 000 $)
Rendement de l’investissement 5 à 7 ans

 

Interventions électromécaniques
  • Remplacement des tours d’eau pour réduire la consommation annuelle de 4,8 millions de gallons
  • Remplacement des refroidisseurs pour assurer une meilleure gestion de la climatisation du bâtiment et une plus grande économie énergétique, ainsi que pour éliminer les risques reliés à une perte de la charge de fréon-12 dans l’atmosphère
  • Remise en état et préchauffage des systèmes d’alimentation d’air neuf, incluant les interventions suivantes : installation d’une thermopompe dans la salle mécanique de chacune des tours de bureaux ; remplacement des systèmes de filtration de l’air, des serpentins de refroidissement, de chauffage et de récupération de chaleur
  • Remplacement des humidificateurs d’origine pour réduire la consommation électrique et éliminer les risques reliés à la propagation de legionella
  • Installation d’un nouveau système de détection de monoxyde de carbone (CO) dans le stationnement intérieur pour améliorer le confort des usagers et réduire la consommation énergétique, en plus de permettre la mise en marche des systèmes d’évacuation sur détection de CO seulement
  • Travaux de régulation et d’éclairage pour améliorer le contrôle au niveau des points de consignes régissant l’ensemble des systèmes électromécaniques du bâtiment
  • Modernisation de l’éclairage par le remplacement des fluorescents T-12 par des T-8 et les ballasts magnétiques par d’autres électroniques

 

Réseau Écolectrique

Au printemps 2008, Hydro-Québec accueillait le complexe Desjardins au sein de son réseau  Écolectrique, mis sur pied pour reconnaître la performance jugée exceptionnelle de ses clients Grandes entreprises (5 MW et plus, tarif L). À savoir ceux qui ont réduit leur consommation d’électricité d’au moins 5 % ou réalisé des économies de 50 millions de kWh et plus en participant aux programmes d’économies d’énergie Mieux Consommer – Grandes entreprises.