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Le carbone intrinsèque : source dominante des impacts environnementaux au Québec

17 août 2022
Par Myriam Drouin

Dans un contexte de mix énergétique à faible impact environnemental, comme c’est le cas avec l’hydroélectricité, l’énergie intrinsèque prend encore plus d’importance.

Les progrès réalisés pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments ont eu pour effet d’augmenter l’importance relative des impacts intrinsèques liés aux matériaux.

Dans son projet de maitrise réalisé à la Chaire industrielle de recherche sur la construction écoresponsable en bois (CIRCERB) de l’Université Laval, Rosaline Larivière-Lajoie a étudié les impacts environnementaux des matériaux d’enveloppe du bâtiment. L’objectif principal du projet était de quantifier la contribution des impacts intrinsèques initiaux des matériaux aux impacts environnementaux du cycle de vie d’assemblages de murs extérieurs pour un immeuble de bureaux dans le contexte énergétique québécois.

L’étude a comparé les impacts environnementaux de huit compositions d’enveloppes, en faisant varier les matériaux de structure et les matériaux d’enveloppe utilisés :

  • trois ossatures légères en bois (LFC = Light  rame Construction);
  • une ossature légère en acier (LSF = Light Steel Framing);
  • deux en bois lamellé-croisé (CLT = Crosslaminated timber);
  • deux en bois lamellécollé dans une approche poteau-poutre (PB = Glued-laminated timber).

Cette comparaison a été possible grâce à une analyse du cycle de vie (ACV) sur le logiciel openLCA, la base de données ecoinvent et la méthode d’évaluation des impacts TRACI. La consommation énergétique lors de la phase d’utilisation a quant à elle été simulée à l’aide du logiciel EnergyPlus.

Source dominante des impacts

Les résultats suggèrent qu'en contexte québécois, les impacts intrinsèques initiaux peuvent être la source dominante d’impacts environnementaux. C'est le cas pour cinq des huit assemblages étudiés, soit pour l’assemblage en ossature légère en acier et les assemblages en bois massif pour lesquels la contribution des impacts intrinsèques initiaux variait entre 52 et 66 %. Dans le cas des assemblages en ossature légère en bois, la contribution des impacts intrinsèques variait plutôt entre 40 % et 51 %.

Pour la majorité des catégories d’impacts, les assemblages en ossature légère en bois (LFC) présentaient les impacts les plus bas, suivis par celui en ossature légère en acier (LSF) et par les assemblages en bois massif (CLT et PB). Non seulement les assemblages en bois massif avaient des impacts relatifs plus élevés que les autres assemblages dans la plupart des neuf catégories d’impact, mais leur contribution aux impacts intrinsèques initiaux était également plus grande dans les quatre catégories d’impacts considérées. Puisque les impacts de la phase d’utilisation sont égaux pour chaque assemblage (même résistance thermique effective), la différence entre les contributions des différentes phases du cycle de vie s’explique par la différence entre les impacts intrinsèques initiaux des assemblages de murs évalués.

La quantité est importante

Deux facteurs peuvent affecter ces impacts: le choix des matériaux et leur quantité. Ainsi, des analyses de contribution ont aussi été réalisées. Bien que le choix des matériaux soit important (bois vs acier par exemple), la moins bonne performance environnementale des assemblages de bois massif s’explique plutôt par la plus grande quantité de matériaux utilisés pour ces assemblages comparativement aux assemblages en ossature légère. Puisque l’ACV des assemblages a été réalisée sur la base d’une même résistance thermique effective et non sur la base d’une même capacité portante, les résultats ont désavantagé les assemblages en bois massif.

Le carbone biogénique, lorsque considéré, est une autre variable qui peut influencer les résultats d’une ACV. Ce carbone étant séquestré lors de la photosynthèse dans les matériaux biosourcés, très présents dans le bois massif, cet assemblage aura ainsi un impact environnemental plus faible quant au potentiel de réchauffement climatique.

Les systèmes d’attache

L’étude a également mis en lumière l’impact des systèmes d’attache en fonction de la durée de vie du bâtiment. Les résultats suggèrent d’une part que l’inclusion des impacts environnementaux associés à la fabrication des systèmes d’attache dans la contribution de la phase de construction au cycle de vie peut augmenter jusqu’à 3,6 %, selon la catégorie d’impact évaluée, et ce sur une durée de vie de 50 ans. Ces résultats suggèrent que les impacts environnementaux des systèmes d’attache ne doivent pas être négligés dans les ACV. D’autre part, les résultats de l’analyse de l’influence de la durée de vie du bâtiment sur la contribution des impacts intrinsèques initiaux au cycle de vie suggèrent que plus la durée de vie est longue et plus les impacts liés à la phase d’utilisation augmentent, alors plus les impacts intrinsèques initiaux diminuent.