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Les appuis financiers à la construction durable

6 juillet 2022

Par Sandra Soucy

Les appuis financiers en efficacité énergétique permettent d’entreprendre des démarches d’amélioration continue pour faire échec aux émissions de gaz à effet de serre. Leur utilisation est fortement encouragée pour mener à bien des projets s’inscrivant dans une perspective résolument durable et responsable.

L'offre est multiple, mais encore faut-il savoir comment s’en prévaloir. D’abord, il convient de souligner que du côté des organismes subventionnaires, les pro- grammes d’appuis financiers sont structurés selon trois grands principes qui se déclinent en programmes prescriptifs, sur mesure et de soutien pour les services professionnels. Christian Lemieux, chargé de projet chez Econoler, explique plus en détail ce qui caractérise ces trois grands volets d’aide aux entreprises.

« D’abord, les programmes prescriptifs qui consistent en un processus de demande financière simplifiée offrant un montant d’argent fixe selon des critères préétablis, notamment selon la capacité de l’appareil ou encore selon sa marque. Les montants accordés sont toutefois moins élevés que ceux alloués par les autres programmes », prévient-il.

« Suivent les programmes sur mesure qui offrent des sommes plus généreuses, calculées à partir des économies d’énergie ou d’après les réductions de GES démontrées après la mise en œuvre, c’est-à-dire sur les résultats réels. Ce processus plus complexe nécessite des étapes de suivi et de démonstration puisque les organismes subventionnaires devront, dans la plupart des cas, soumettre leurs résultats à la Régie de l’énergie », souligne l’expert chez Econoler.

« Enfin, les programmes de soutien pour les services professionnels visent surtout les études de faisabilité détaillées ou la mise en œuvre de la norme ISO 50001 pour les systèmes de management de l’énergie, mais aussi les tâches de mesurage et de vérification de la performance réelle des projets, ainsi que les services professionnels pour les remises en service des systèmes mécaniques (recommissionning). »

« Il existe aussi un volet axé sur la démonstration technologique pour des technologies qui sont en cours de développement, rajoute-t-il. Ce dernier s’adresse aux entreprises qui développent essentiellement des technologies et qui voudraient participer à l’élaboration de projets pilotes. À titre d’exemple, nous savons que le gouvernement fédéral s’intéresse de près au développement de la filière hydrogène et en souhaite l’accélération. Ce type de technologie pourrait très bien faire l’objet d’un projet pilote tout en étant subventionné. Même chose pour la biométhanisation. Il s’agit essentiellement de développement, mais pour une entreprise qui voudrait faire partie de l’équation et être un chef de file dans ce secteur, il s’agit d’une belle opportunité à saisir. »

Les principaux organismes impliqués dans la transition énergétique offrent leurs appuis financiers pour soutenir différents projets qui désirent accélérer leur objectif d’efficacité énergétique, que l’on pense notamment à Hydro-Québec et à ses mesures qui touchent l’électricité ou encore à Énergir qui, pour sa part, finance des études pour réduire la consommation de gaz naturel. Mais comme le souligne Pascal Véronneau, associé principal, ingénieur en efficacité énergétique chez Énergénia, il existe d’autres approches taillées sur mesure qui relèvent davantage du cas par cas et qui nécessitent l’intervention d’un ingénieur pour faire le calcul des économies.

« Transition énergétique Québec (TEQ), par exemple, offre différents programmes qui s’articulent essentiellement autour de la réduction des émissions de GES, alors que le programme Écoperformance met l’accent sur les études et la réalisation et se décline en deux volets : une subvention pour l’étude, et, si le client veut aller de l’avant, une autre qui pourra être accordée en lien avec les tonnes de GES évitées. On compte aussi le Fonds Écoleader, poursuit-il, très flexible quant aux appuis et à l’admissibilité, qui est destiné aux entreprises à but lucratif. Il faut préciser que le Fonds Écoleader s’inscrit dans une démarche d’accompagnement strictement, et non dans la réalisation. Fait intéressant, ces derniers financent désormais jusqu’à 75 % des dépenses admissibles des entreprises québécoises. »

Pourquoi y avoir recours ?

Faire appel aux appuis financiers favorise la réalisation de projets qui, autrement, n’auraient peut-être jamais vu le jour. Mais aussi, cela contribue à rehausser les ambitions d’un client qui craindrait, par exemple, les résultats d’une étude s’il avait eu à la prendre en charge sans aucun soutien. « Tout en réduisant le risque du côté du client, je crois que les appuis ont un impact réel sur la réalisation des projets. Il s’agit bien là de l’objectif de ces programmes que de “mettre l’épaule à la roue” pour que les projets se réalisent de pair avec une rentabilité suffisante », affirme Pascal Véronneau.

Bianca Robitaille, responsable, standard énergie chez Safran, abonde dans le même sens : « Il ne fait pas de doute que les appuis financiers constituent un incitatif efficace pour entreprendre une démarche d’amélioration continue. Notre projet de diminution de GES a pu voir le jour d’abord grâce à une volonté de notre siège social de pousser d’un cran ce projet qui met en œuvre des mesures d’efficacité énergétique, mais il va sans dire que sa concrétisation doit beaucoup aux appuis financiers dont nous avons profité. Avec l’obtention de subventions gouvernementales, nous devons aussi répondre à certains standards et cela a pour effet de procurer un solide encadrement pour effectuer les meilleures pratiques. Ces appuis accordés nous permettent non seulement d’aller de l’avant avec des projets qui mettent en œuvre des mesures d’efficacité énergétique, mais aussi de bien comprendre les avantages d’entreprendre de telles mesures et d’adopter des pratiques écoresponsables pérennes. »

Les avantages

Les programmes d’appuis financiers permettent, d’une manière générale, de financer entre 50 % et 75 % des couts admissibles d’un projet. « Mais attention, prévient Christian Lemieux : il ne faut surtout pas confondre couts admissibles et couts totaux d’un projet! Par exemple, il ne s’agit pas de remplacer un appareil qui était déjà en fin de vie et qui était voué à être changé de toute façon. En fait, c’est le surcout entre le remplacement d’un appareil à technologie standard pour un appareil à technologie efficace, c’est-à-dire qui réduit la consommation d’énergie ou de GES, qui est admissible. L’importance d’apporter cette distinction est bien sûr d’éviter l’opportunisme et d’éliminer les travaux qui ne maximiseraient pas l’efficacité énergétique. »

Selon Pascal Véronneau, le programme de la remise en service de Transition énergétique Québec en est un très avantageux, qui offre un énorme potentiel, mais qui est probablement sousutilisé, cette pratique n’étant pas encore courante au Québec.

« Le potentiel est énorme du côté de TEQ qui, très confiant de sa démarche, n’hésite pas à soutenir l’innovation à hauteur de 75 %, lance-t-il. Il s’agit de mesures peu invasives qui ciblent l’optimisation des équipements existants avec en prime une période de rendement de l’investissement s’échelonnant sur un à deux ans seulement. Le Fonds Écoleader, dont le pourcentage des dépenses admissibles servant au calcul de l’aide financière a récemment été bonifié à hauteur de 75 %, demeure des plus intéressants pour les entreprises, mais ce dernier concerne exclusivement la réalisation d’études », prévient l’expert.

Encourager l’innovation

Alors que bon nombre d’organismes subventionnaires valorisent certains axes technologiques, d’autres proposent de nouveaux programmes dont l’objectif est de résoudre des enjeux de société. « Hydro-Québec, par exemple, développe des technologies pour gérer la pointe électrique hivernale qui obtient des résultats bénéfiques, alors qu’Énergir poursuit ses objectifs d’augmenter sa distribution de gaz naturel renouvelable dans son réseau pour réduire les émissions de GES dans une approche globale. Et c’est sans oublier l’autre enjeu important pour Énergir qui consiste en le développement de technologies axé sur la biométhanisation, observe Christian Lemieux. La valorisation des rejets thermiques industriels n’est pas en reste non plus, avec la mise en place du programme de TEQ qui vise à connecter les industries qui rejettent de la chaleur dans l’atmosphère avec la mise en œuvre d’un réseau de chaleur urbain à faible cout qui profitera à un nombre considérable de consommateurs d’énergie localement. »

Comme le rappelle le chargé de projet chez Econoler, pour bien tirer profit de tous ces programmes, il faut être à l’affut de tout ce qui se passe dans le domaine et toujours se tenir prêt à déposer un projet lorsque l’appel à projets est lancé. Et surtout se renseigner sur les priorités des gouvernements et de leurs ministères. « Une façon toute simple d’y parvenir consiste à participer aux activités des organismes, des associations du secteur des technologies émergentes comme Échotech Québec, notamment, qui bénéficie d’un processus de veille bien établi. Du côté des appels à projets lancés le plus souvent par le gouvernement fédéral, ceux-ci ne sont pas très publicisés et lorsqu’ils le sont, c’est maintenant, prévient-il! D’où la pertinence d’avoir recours aux organismes à but non lucratif comme Échotech Québec. »

« Les subventions existent et sont établies depuis longtemps et les organisations subventionnaires sont connues. Par contre, il n’est pas toujours facile de savoir vers quelle subvention se tourner pour notre projet. Il est impératif de prendre le temps de bien s’informer, d’être proactif, de prévoir les délais et surtout de bien s’entourer et de préparer des dossiers solides. Respecter cette approche se traduira en moins d’opportunités ratées. Il est aussi essentiel d’entreprendre ses démarches dès que les idées de travaux qui pourraient avoir un impact sur la consommation d’énergie surgissent, et de toujours avoir le réflexe de s’interroger sur les aides financières qui pourraient s’appliquer. On ne saurait trop insister sur la nécessité de préparer le dossier de demande d’aide financière avant de commencer le projet et souvent, même avant d’avoir terminé l’étude de faisabilité détaillée qui nous donne le résultat final. Et la bonne nouvelle, c’est que cette étude est aussi subventionnée. Puis, finalement, ne pas omettre de collecter l’information tout au long du projet puisqu’elle pourrait être exigée par certains programmes, lorsque les travaux seront terminés, pour recevoir le versement d’aide financière, conclut-il. »