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Faire échec à l’élimination

La récupération des résidus de chantier a grandement progressé ces dernières années au Québec. Mais il reste encore beaucoup à faire pour favoriser l’essor de cette filière. 

Par Rénald Fortier

Dans un passé pas si lointain, la presque totalité des résidus de construction, de rénovation et de démolition (CRD) prenait encore systématiquement le chemin de l’élimination. C’était avant l’adoption de la première politique québécoise de gestion des matières résiduelles en 1998, à une époque où l’évocation des mots récupération et recyclage renvoyait tout de suite à la marginalité dans le milieu de la construction. 

Mais force est de constater que la situation a beaucoup évolué au fil des ans. D’autant plus rapidement avec l’imposition, en 2006, d’une redevance de 10 dollars indexée annuellement – maintenant 11,71 dollars – sur l’élimination de chaque tonne métrique de débris, à laquelle s’est superposée une autre taxe de 9,50 dollars la tonne en 2011. 

C’est que la mise en place de ces redevances, qui totalisent aujourd’hui 21,65 dollars, a contribué à faire contrepoids à des prix à l’enfouissement qui étaient ridiculement bas un peu partout dans la province. Et, du même coup, à donner un peu d’oxygène à des entreprises qui visaient à récupérer les matières en vue de les aiguiller vers le recyclage, la valorisation ou le réemploi dans certains cas. 

D’autres facteurs ont également concouru à détourner de l’enfouissement un volume croissant de résidus de chantier au Québec. À commencer par les efforts déployés par le Regroupement des récupérateurs et des recycleurs de matériaux de construction et de démolition du Québec (3R MCDQ) et RECYC-QUÉBEC pour sensibiliser les milieux du génie civil, de la voirie et du bâtiment à l’importance de donner une deuxième vie aux matériaux. Tout en veillant à favoriser l’émergence d’une véritable infrastructure de récupération en sol québécois.

L’avènement des certifications LEED et BOMA BESt, qui s’accompagnent d’objectifs à atteindre sur le plan de la récupération des résidus CRD générés sur les chantiers ou dans la foulée de l’exploitation immobilière, a aussi contribué à cette évolution. Tout comme l’introduction de la norme du Bureau de normalisation du Québec (BNQ) couvrant l’utilisation de matériaux recyclés en remplacement de granulats neufs.

C’est ainsi que la récupération des débris CRD n’a cessé de prendre de l’ampleur au fil des ans. En témoigne la progression rapide du volume de matières détournées de l’enfouissement, qui est passé de 875 000 à 2 894 000 tonnes au cours de la période allant de 1996 à 2006. Seulement deux ans plus tard, le taux de récupération des résidus provenant de la construction, de la rénovation et de la démolition s’élevait déjà 75 %. C’est dire.

« Nous sommes partis de très loin et nous avons parcouru un bon bout de chemin, c’est vrai, mais il reste encore beaucoup de travail à accomplir, indique Gilles Bernardin, président du 3R MCDQ. Surtout quand on sait que le béton, l’asphalte et la pierre comptent toujours pour la majeure partie des matières récupérées. »

Voilà pourquoi l’organisme entend continuer de travailler sans relâche au développement de filières d’écoulement pour les matières récupérées, tout en veillant à élargir encore davantage son rayonnement auprès de toute la chaîne d’acteurs interpellés par la question des résidus CRD.

Une référence

Il faut dire que le 3R MCDQ est devenu une véritable référence dans son milieu au fil des ans, lui qui s’est déployé au rythme où progressait la récupération des matières et qui s’est notamment posé comme un interlocuteur de premier plan auprès des autorités gouvernementales concernées.

« Tout était à faire lorsque le 3R MCDQ a été créé il y a 19 ans, relate sa directrice générale Ginette Pellerin. L’association comptait une vingtaine de membres dans les premières années, puis de plus en plus d’entreprises ont joint ses rangs à compter de 2005. De sorte qu’aujourd’hui, elle représente 250 membres. »

Pour elle, il ne fait pas de doute que ce qui a démarqué le 3R MCDQ, ce sont ses études visant à trouver des débouchés pour les matières. De même que ses recommandations formulées de mémoire en mémoire aux instances gouvernementales pour contribuer à l’avancement du secteur. Parmi ses recommandations qui ont été entendues, soulignons la taxation sur l’élimination et l’obligation de diriger 70 % des résidus CRD vers des infrastructures de triage, pour ne citer que ces exemples.

« Le 3R MCDQ a toujours cherché à bien cerner les problèmes faisant obstacle à la récupération et au recyclage, puis à identifier des solutions. C'est ce qui a toujours fait sa grande force », conclut-elle.