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Récupération de matières CRD et remise en marché vont de pair. D’où l’importance de développer des débouchés. 

Par Rénald Fortier 

Qui dit récupération de débris CRD, dit du même souffle commercialisation des matières. Car disposer de l’infrastructure requise pour récupérer, trier et traiter les matières est une chose, réussir à les écouler sur les marchés du recyclage, de la valorisation ou du réemploi en est une autre. D’autant plus que le prix exigé par les récupérateurs doit nécessairement être inférieur au coût de l’enfouissement.

Les matières affichant une bonne valeur, tel le métal, ne posent évidemment pas de problème. Mais il n’en va pas de même pour tous les résidus provenant des chantiers de construction, de rénovation et de démolition. Certains n’ont aucun débouché, alors que d’autres n’ont accès qu’à des marchés restreints ou instables. 

Voilà pourquoi le 3R MCDQ a mis sur pied des groupes de travail ayant pour mandat d’ouvrir des filières de commercialisation suffisamment rentables et durables pour ces matières. Il s’est donc successivement attaqué aux problématiques que posaient notamment les agrégats (débris de béton de ciment, d’enrobé bitumineux, de pierre et de brique), le bois, les bardeaux d’asphalte et le gypse. 

C’est ainsi qu’il a été à l’origine de l’introduction de la norme NQ-2560-600 / 2002 couvrant l’utilisation d’agrégats recyclés en remplacement de matériaux granulaires neufs. Publiée par le Bureau de normalisation du Québec en 2002, cette dernière a été mise en place pour encadrer, faciliter et encourager l’utilisation adéquate des matériaux recyclés en les classifiant et en les caractérisant. Le tout selon les différents types d’usage dans les travaux de construction et d’entretien dans l’infrastructure et le bâtiment. 

Mais le dossier n’en est pas aujourd’hui clos pour autant. Il faut savoir que ce sont six millions de tonnes de béton et trois millions de tonnes de résidus d’asphalte qui sont produits bon an mal an au Québec. Si ces matières sont en grande partie récupérées, il reste que leur potentiel de commercialisation est loin d’être atteint. 

« Il y a encore de la résistance, dit Jean-Yves Voghel, président du comité Agrégats et bardeaux d’asphalte. Le ministère des Transports intègre en partie des agrégats recyclés dans ses nouveaux ouvrages, certaines villes aussi. Mais ce ne sont pas toutes les villes qui sont prêtes à en utiliser, d’autant plus que des firmes de génie-conseil ne sont pas chaudes à l’idée. 

Le président de Voghel inc. note que le 3R MCDQ a encore du travail à faire auprès des donneurs d’ouvrage pour leur faire découvrir les propriétés et les avantages des agrégats recyclés, tant sur les plans environnemental qu’économique. Des efforts de  sensibilisation qu’il faut également poursuivre dans le cas des bardeaux d’asphalte récupérés – 300 000 tonnes sont générées par année –, en même temps que les expérimentations visant à leur trouver de nouveaux débouchés. 

Le bois

La situation est bien différente avec le bois. La question n’est pas de savoir si de grands volumes de résidus pourront être dirigés vers le recyclage, mais quand. Du moins pour ceux pouvant être réintroduits dans de nouveaux produits, par exemple des panneaux de particules, ou être utilisés du côté de la valorisation énergétique. 

Pourquoi ? Tout simplement parce que l’interdiction graduelle d’enfouir le bois enchâssée dans la plus récente Politique québécoise de gestion des matières résiduelles, et de son plan d’action 2011-2015, tarde à être mise en application. Prévue pour 2014, elle a été reportée à trois reprises à ce jour. 

« Des marchés existent déjà pour le bois de bonne qualité, celui visé initialement par le projet de bannissement », indique le président du comité Bois au 3R MCDQ, Sylvain Martel, en soulignant que l’écoulement de certaines catégories de bois risque de s’avérer problématique éventuellement, par exemple ceux enduits de créosote ou de colle. 

« Nous avons hâte de passer à la prochaine étape, ajoute celui qui est directeur de l’approvisionnement en bois chez Tafisa Canada. Nous sommes cependant conscients que l’interdiction d’enfouir le bois exigera un contrôle accru sur le terrain et que le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques doit composer avec un contexte budgétaire restrictif. » 

Le gypse

Les résidus de gypse, eux, ont vu des horizons commerciaux s’ouvrir ces dernières années. Plus particulièrement du côté des fabricants de Placoplâtre (fabrication de nouveaux panneaux), des cimentiers (régulation du temps de prise et du durcissement du béton) et de l’agriculture (amendement des sols). 

Mais il reste que les marchés sont encore restreints, surtout pour le gypse postconsommation. Dans certains cas parce que les repreneurs n’ont pas de très grands besoins en poudre de gypse recyclée, dans d’autres parce que les volumes récupérés ne sont pas encore au rendez-vous. « Un fabricant de panneaux comme Lafarge n’est pas intéressé en bas de 5 000 tonnes annuellement », note Katy Major, membre du comité Fractions fines et gypse du 3R MCDQ. 

Pour celle qui est présidente de Recycle Gypse Québec, il est clair que le 3R MCDQ va continuer de déployer des efforts pour hausser les volumes à recycler, tout en travaillant à l’élargissement des marchés actuels et au développement d’autres débouchés potentiels.  

Quelque 200 000 tonnes de résidus de gypse sont générées annuellement sur les chantiers de rénovation et de démolition, auxquelles s’ajoutent environ 70 millions de tonnes de retailles de gypse neuf rebuté sur les chantiers (15 à 20 % de découpe et de perte).